C’est d’abord un bourdon qu’on a essayé de chasser de la main – en vain – tout le printemps : « The Party », catchy jusqu’au niais avec ses lalala féminins qui doublent tous les couplets, et pourtant d’une puissance assez certaine pour être ce que les anglais (ou américains, ne soyons pas bégueules) nomment « earworm » : un ténia d’oreille. La question subséquente se pose aujourd’hui à propos de Singtank : « In Wonder » s’est-il développé en maladie pop honteuse sur la lancée ? On répond par la bande. D’abord, il est patent que le groupe ne met qu’une moitié des atouts de son côté : un mauvais jeu de mots en guise de nom, une pochette littéralement hideuse dont le but premier semble de les enlaidir, Singtank ne s’assume que partiellement. C’est que le duo – Joséphine de la Baume et son frère Alexandre – est né une cuillère dorée dans la bouche puisque doté d’un mari et beau-frère pas comme les autres, Mark Ronson, soit le producteur multi-platiné d’Amy Winehouse à banane rétro-futuriste. On sent bien que Singtank veut être jugé pour lui-même – et rien que pour lui-même – comme ces beautés qui aspirent à être aimées pour leur âme en premier lieu. Et s’il échappe au népotisme en n’étant pas produit par le sieur Ronson – décence minimale – il se voit quand même mis en son pour moitié par une giga-pointure un peu passée, Nellee Hopper dont le travail entre pop et variété a juste ce qu’il faut de relief (interrogeons nous sur les groupes français débutants qui pourraient se payer un tel monsieur sur la foi de démos). Malgré cette extra-touche de glamour qui fâche, on peut supposer que Hopper ait été séduit par les compositions d’Alexandre de la Baume qui avancent l’air de rien et s’imposent sans qu’on ait besoin de s’en offusquer. Les tempos lents, notamment, ont un petit charme automnal assez surprenant, et « Dicksmith » utilise parfaitement l’accordéon (ou le clavier qui en tient lieu), instrument casse-gueule s’il en est. A l’étage goût du jour, « Limits Of My Fingers » offre un beau déhanché Kitsuné et des hoquets Franz Ferdinand, comme s’il en pleuvait. A la case « punchy », c’est « Give It To Me » qui répond en échappant d’un rien à la bourrinnade de batterie. Bien séduits, on n’en remarquera pas moins que les voix – frère et soeur – manquent de personnalité, et que toutes les chansons ne sont pas, loin s’en faut, au niveau de « The Party » ou de « Dicksmith ». Mais « In Wonder » a ce qu’il faut de discrétion et de retenue pour qu’on attende la suite avec curiosité.
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