C’est maintenant indéniable : le français a retrouvé sa place dans la pop de chez nous. Les groupes n’ont plus peur de la langue de Molière pour chanter peines de coeur, amours perdues et envies d’ailleurs. Au milieu de la masse s’est fait remarquer Granville, ces quatre jeunes gens qui rêvent « d’amener la Californie en Normandie ». Tout un programme.
Le groupe a commencé par nous parler de « Jersey », single matraqué pendant plusieurs mois, qui évoque l’île du même nom que l’on voit depuis Granville, cette ville normande mise en lumière par le groupe. Si l’on peut penser que Granville ne vise pas forcément juste sur la carte pour rapatrier la Californie, je trouve aussi que le single n’est pas totalement représentatif de ce dont est capable le groupe. Plus malin, plus fin que la simplicité de « Jersey », Granville signe de bien beaux titres, dont certains frôlent (et même plus que ça) le statut de « tube ». Il y a « Le slow », pop enlevée à danser collé-serré, tout comme « Robe rouge », alors que « Corps perdus » ou « Jeans troués » voient le rythme s’élever, sans pour autant se départir de ces mélodies, au charme rétro, parfois teinté de surf et d’une atmosphère nostalgique jamais plombante. Il y est question de « Nancy Sinatra » et de « Polaroïd » (tous deux excellents), de chagrins et de joies en tous genres, mais il se dégage une vraie sincérité de ces chansons, qui respirent un réel plaisir d’être ensemble, de faire une musique qui leur ressemble, qui est celle de jeunes gens qui rêvent d’être un peu plus en décalage, de temps et d’atmosphère. Et j’y crois, j’y crois d’autant plus que l’ensemble montre une cohérence jamais prise à défaut, sans compromissions, pas même celle d’une dernière goutte de mélancolie avec « Les voiles » pour finir. S’il n’y a de bon vent que pour celui qui sait où il va, nul doute que Granville a une bonne boussole, une bonne raison d’embarquer.