« Shake Shook Shaken » est un album percutant à l’immédiateté mélodique imparable qui prend le parti d’ouvrir quasiment toutes ses pistes par des refrains accrocheurs dignes de la radio pop-rock qui reste encore à inventer. Pour défendre ce troisième opus, Dan Levy et Olivia Merilahti ont enfilé la tenue de combat, et mettent leur talent à nu, sans l’aide de la six-cordes, ou presque, pour envoyer dix coups de poing ponctués de quelques caresses. Dès le single d’ouverture « Keep your lips sealed », les compositions utilisent les codes d’une pop-électro synthétique, tirant par moments sur le R’n’B avec l’utilisation de voix vocodées (« Going through walls »), de beats enjôleurs et de paroles assénées. Dans ce sens, si « Despair, Hangover and Ecstasy » flirte avec la pop racoleuse à la première impression, l’écoute de sa version acoustique révèle toute son efficacité dans le dénuement.
Les formules entêtantes écrites par Olivia ponctuent l’album entièrement chanté en anglais : les rimes de « Trustful Hands » notamment, mais surtout le sommet de poésie qui semble enfiler les allitérations et les jeux de mots autour d’abréviations, « Anita no ! », une ritournelle débutée à la flûte de Pan (« Anita need to teach you the A.B.C./Anita need to dispose of Y or X/Anita need to reach you A.S.A.P./Anita need to spell A.N.I.T.A.).
Ces refrains récurrents construisent progressivement, entre couplets apaisés et ponts effrénés, des courses à la force mélodique qu’on s’attendrait à voir s’épuiser. Or après la montée en puissance de « Sparks », on trouve encore la petite musique de mauvais augure de « A mess like this » avant la tempête d’incantations chorales qui habillent de leur timbre aigu le début de « Lick my wounds ».
La voix d’Olivia, granuleuse, malléable, toujours au point de rupture, demeure le repère, le refuge dans lequel l’auditeur peut venir chercher la chaleur dans ce disque aux allures conquérantes. « Shake Shook Shaken » affirme l’unité de The Dø – le groupe – après la rupture de The Dø – le couple –, et c’est avec réussite qu’il envoie ses fusées pop en mode mineur.