Dix ans déjà que les merveilleux Delgados ont tiré leur révérence. Voici justement de quoi mettre du baume au cœur de ceux qui continuent à se languir de cette vénérable institution de la pop écossaise. Le troisième album solo d’Emma Pollock, chanteuse et fondatrice des Delgados, commence précisément comme un disque de son ancien groupe : « Cannot Keep a Secret » et « Don’t Make Me Wait » raniment l’écriture ample et palpitante dont Pollock et son époux Paul Savage (présent ici encore aux manettes) s’étaient fait les spécialistes du temps des classiques « The Great Eastern » (2000) ou « Universal Audio » (2004).
Toutefois, si son goût pour une certaine efficacité mise au service des structures traditionnelles du rock indé n’a pas complètement disparu, ce nouvel effort se distingue par sa volonté d’ouvrir des perspectives inédites. Ainsi, passées les premières plages attrayantes mais sans surprises notables, le disque glisse peu à peu vers des territoires mouvants restés jusqu’ici inexplorés. Prise dans un entrelacs de cordes, Emma Pollock s’essaie alors avec succès à la pop de chambre le temps d’une somptueuse « Intermission », trouve un contrepoint idéal dans le jeu de guitare si particulier de son compatriote RM Hubbert (« Monster in the Pack »), pour finalement atteindre sa plénitude avec « Old Ghosts », final dont l’humeur songeuse rappelle la Tracey Thorn crépusculaire de « Love and Its Opposite ».
Nous n’irons pas jusqu’à parler ici d’album de la maturité. Le fait est pourtant que ce très personnel « In Search of Harperfield », ainsi nommé en référence à la première maison de ses parents et largement inspiré de sa propre histoire familiale, est bien ce que cette grande artiste nous a offert de plus accompli à ce jour. Une réussite majeure.