Non contents d’exceller sous l’alias Erland & the Carnival, les Londoniens Erland Cooper et Simon Tong (The Verve, Blur…) président également aux destinées de The Magnetic North. Premier enregistrement de ce projet mené par les deux compères et la chanteuse irlandaise Hannah Peel, « Orkney : Symphony of the Magnetic North » (2012) célébrait les noces hantées de la pop symphonique et du folk céleste, pour un album concept en hommage à l’archipel des Orcades. Cette curieuse affaire aurait pu n’être qu’un one shot passionnant, simple parenthèse dans l’itinéraire de ces musiciens à l’imagination particulièrement débridée. Quatre ans plus tard, le groupe reprend pourtant la barre pour un deuxième long format inspiré cette fois par Skelmersdale, ville nouvelle du Lancashire dans laquelle Simon Tong et sa famille vécurent et qui reste célèbre pour avoir été le point de ralliement des adeptes de la méditation transcendantale dans les années 80. Si The Magnetic North délaisse donc la nature hostile des îles écossaises pour se consacrer au récit des utopies d’une cité du centre de l’Angleterre, les ambitions musicales du trio n’ont pas été revues à la baisse.
Illustrées par des archives sonores et des commentaires d’époque, soit une approche un peu comparable à celle de Public Service Broadcasting, les compositions forment ici une sorte de documentaire dont il est toutefois possible d’apprécier le rendu sans nécessairement en saisir le sens profond. Car au-delà de sa trame narrative, « Prospect of Skelmersdale » est avant tout un disque pop. Pop au sens noble du terme, puisque capable de tirer profit d’un certain foisonnement orchestral sans pour autant apparaître prétentieuse ou surchargée. Mentions spéciales à « Cergy-Pontoise », à « The Silver Birch » et surtout à une « Sandy Lane » touchée par la grâce et dont les arabesques de cordes n’ont rien à envier aux prouesses de Sufjan Stevens. Jouant sur les registres vocaux complémentaires de Peel et Cooper, The Magnetic North sait aussi varier les climats, empruntant les codes rétrofuturistes de l’electro pop (« A Death in the Woods », « Remains of Elmer ») ou se retranchant derrière la sobriété d’une ballade atmosphérique au piano (« Exit »). Une relecture de « Run of the Mill » (George Harrison) vient clore en beauté cet album original et accompli. Encore un sans-faute.