Parfois, il suffit de quelques éléments de style pour tomber instantanément amoureux d’une chanson, comme trois accords de guitare acoustique, des vocalises d’une rare classe, une ligne de basse qui rebondit innocemment et un sursaut d’électricité légèrement distordue. Il n’en faut pas plus pour avoir envie d’écouter encore et encore « Heavin’ Heavies » de Terry, titre judicieusement placé à la sixième position de « Remember Terry », le second album du super-groupe d’Al Monfort (Dick Diver, Total Control), Zephy Pavey (Total Control aussi), Amy Hill (Constant Mongrel) et Xanthe Waite. Cette musique donnerait de la vigueur aux plus fatigués et les voir sur la petite scène de la Mécanique Ondulatoire a suffit pour éclaircir notre monotonie.
Du post-punk débraillé truffé de clins d’oeil à Mark E.Smith de « Start a Tape » au rock nerveux de « Give Up The Crown » en passant par la pop lo-fi déglinguée de « Glory », les quatre musiciens de Terry nous offrent en vingt-huit minutes et dix morceaux un condensé aux contours indistincts ce que l’on peut entendre aujourd’hui de la scène alternative australienne. Sur « Take Me To The City », on les imagine en train de rembobiner les bandes enregistrées, ne réalisant pas qu’il qu’ils tiennent là un hit, de ceux dont les rythmiques entêtantes trouvent une place de choix au fin fond de notre cerveau.
On est presque triste à l’écoute des dernières notes de « Homage » – une boite à rythme un peu cheap, deux guitares, l’une est acoustique et l’autre est électrique, un synthé anémique et un bel exercice de vocalise à trois – le morceau s’étire doucement pour annoncer sa conclusion et nous laisse avec l’indéfectible sensation de réécouter « Remember Terry » depuis le début. Nous étions probablement une cinquantaine à les voir en concert à Paris il y a quelques semaines mais nous sommes indéniablement partis avec la conviction d’avoir vu de ces groupes de rock qui auraient pu être nos amis, de ceux qui ont su rester à notre portée.