MY BRIGHTEST DIAMOND – Paris, Le Point Ephémère, 22 Avril 2008
Elle nous avait prévenus la veille pendant notre interview : "pour mon anniversaire, je vais faire une grosse fête !". C’est donc un Point Éphémère très décoré qui nous accueille, ballons de baudruche à foison, flamants roses suspendus de-ci de-là. Shara se fait attendre, retenue en coulisse par des travaux de collage. Dès son arrivée sur scène, elle distribue chapeaux pointus, langues de belle-mère et ballons à l’assistance. Voilà qui décrispe l’ambiance, bien loin du romantisme et du sérieux apparent de la musique de Shara et de l’imagerie un poil gothique qui tourne autour.
Comme elle le précise, ce concert s’inscrit dans le cadre d’une petite tournée promo de six dates en solo, il n’empêche que l’ambiance n’est pas du tout au showcase au rabais. Après sa petite distribution, Shara attaque avec ce qui sera le premier single extrait de son nouvel album, "Inside a Boy" et la magie opère immédiatement… Dès qu’elle commence à jouer, tout l’enthousiasme et l’énergie se cristallise en une musique d’une intensité inédite qui emporte vite l’adhésion du public, ne perdant pas une miette des mimiques d’une Shara virevoltante et malicieuse… Castafiore parfois un peu distante sur disque, sur scène, elle joue avec sa voix d’une façon qui finit par m’évoquer, à l’insu de mon plein gré, le Jeff Buckley période Sin-é, tel que je me l’imagine du moins. Bon sang mais c’est bien sûr, cette voix, ce jeu de guitare, cette capacité qu’a Shara d’habiter ses morceaux, de les métamorphoser, à elle toute seule, qu’il s’agisse de ses propres compositions ou de reprises…
Elle enchaîne d’ailleurs sans sourciller une reprise de Dayna Kurtz ("Postcards From Downtown"), voix dans les graves, émotion contenue, à une de Prince, et non des moindres (un "When Doves Cry" presqu’aussi intense et tubesque que l’original), avant de revenir à son répertoire avec un "Dragonfly" littéralement féérique. Le côté un peu intimidant, dramatique parfois, de la musique de My Brightest Diamond sur disque est oublié, surtout quand on voit Shara boxer pour mimer les paroles d’une chanson, "Black and Costaud", inspiré par Ravel et "l’Enfant et les sortilèges" ou qu’on l’entend nous raconter l’histoire de son ukulélé, rapporté d’Hawaï par ses parents, qui ne connaissent manifestement rien en matière de ukulélé (mais on ne leur répétera pas, promis). N’empêche qu’elle s’en tire aussi bien avec un ukulélé bas de gamme qu’avec une guitare ou un kalimba. Le renfort de l’élégant Charlie O sur trois morceaux à l’orgue Hammond, bien que très sympathique, paraît presque superflu.
Après avoir soufflé ses bougies sur scène et offert deux rappels bien courts, Shara s’en va. Le public, conscient d’avoir vécu un moment d’exception, en redemande. Mais non, c’est fini, Shara reviendra en juin, à Evreux pour, on l’espère, un concert d’une égale intensité.
Ah oui, il est également assez exceptionnel de voir une artiste dédicacer des flamants roses à la sortie d’un concert.
Guillaume Sautereau
A lire également, sur My Brightest Diamond :
la chronique de « Tear It Down » (2007)
l’interview (2007)
la chronique de « Bring Me the Workhorse » (2006)
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