Après un premier soir que j’ai dû zapper, il était quand même temps de payer ma visite annuelle au festival Vie Sauvage. La météo fut le premier sujet de préoccupation pour mes amis et moi-même, car l’averse aux abords du lieu du festival fut de celles qui refroidissent même quatre personnes motivées. Mais qu’y a-t-il eu pour qu’au final la soirée soit si bien épargnée par les éléments ? Nul ne le saura jamais, mais Vie Sauvage et sa soirée payante auront eu lieu – fort heureusement – dans de bonnes conditions, permettant de profiter du cadre toujours enchanteur du parc de la Citadelle, dans une ambiance toujours aussi bon enfant et familles (au pluriel – locaux et festivals proches).
Le programme alléchant commence avec Thousand. Le groupe de Stéphane Milochevitch, auteur d’un remarquable album paru chez Talitres il y a quelques semaines, méritait certainement une foule plus dense pour ouvrir la soirée, mais les gens en sont encore aux rafraîchissements (par ailleurs excellents) et aux agapes. Vaillamment, je m’installe tout devant ou presque avec ma moitié, conditions idéales pour profiter d’un set parfaitement calibré, généreux et varié. 45 minutes d’une pop aux ramifications folk multiples (l’inverse est tout aussi valable), à la fois simple et dense, porté par la voix remarquable de mister Milochevitch (très classe tout de noir vêtu), et un panel de chansons pour le moins séduisantes (“Song of Abdication”, “Eden”, “The Flying Pyramid” – jouée à la fin) font de cette entrée en matière un excellent moment.
L’attente pour bénéficier de quoi manger fut certes moins plaisante, mais c’est le ventre plein et heureux que je prends place pour Forever Pavot. Si Emile Sornin, aux faux airs de Gary Oldman dans le “Dracula” de Coppola, est évidemment le centre de gravité du site, il a su s’entourer de très talentueux musiciens pour arriver à tisser une toile mélodique super évocatrice (pop 60’s, psychédélisme et petite touche qui donne envie de danser) mais tellement bien exécutée qu’on se laisse volontiers prendre au piège. Il est question de Tintin et son générique, de nouveaux titres qui se glissent parfaitement auprès des classiques de son album paru chez Born Bad, le tout assumé avec un talent indéniable et une décontraction des plus adéquates vu le lieu et l’ambiance.
La nuit tombe sur Bourg, la pluie est présente par moments, mais imperceptible ou presque. Il va donc revenir à Barbarossa la lourde tâche de relancer la soirée, l’Anglais se présentant avec une belle côte parmi les festivaliers. Je ne connais guère mais m’approche, pour finalement ressortir de ces 50 minutes de set plutôt conquis. Les passages les plus enlevés, portés par un efficace duo entre les claviers et le batteur (excellent par ailleurs) ont en effet largement compensé les moments plus calmes, parfois un tantinet pesants. L’énergie prend le pas, mais grâce à des mélodies chaloupées et riches et une voix de velours, l’émotion est toujours présente (quelque part entre un Massive Attack soft, un James Blake moins dépressif sans oublier une base de songwriter classique). Beaux moments sur “Turbine”, “Imager” ou encore “The Load”, qui donne envie de retrouver rapidement cet Anglais que je n’avais pas réellement repéré mais que je suivrai avec attention.
NUIT, en voilà un nom approprié pour un groupe qui doit se produire alors que le soleil a déserté depuis de longues heures. Manque de chance pour moi, je suis un peu resté sur ma faim avec ce projet (contrairement à ma collègue Séverine), très soigné au niveau du visuel (éclairage, etc…) mais dont le style, entre un rock un peu lourd et des inpirations un peu trop visibles, m’a laissé sur ma faim. Le public a cependant été conquis, et le groupe a affiché une belle maîtrise scénique malgré sa jeunesse.
Pour clôturer, Vie Sauvage avait confié les clés à Thylacine, qui arrivait d’un concert couronné de succès à la Gaîté Lyrique la veille. Le musicien français affiche une grande forme, à en juger par les bonds qu’il fait derrière ses machines, animant de ce fait un set qui ne manquait pas d’aspérités. Si les ambiances sont travaillées, avec de belles textures et des montées mélodiques parfaitement digérées, il y a aussi ce qu’il faut de tension (“Mountains”, “Anthem”) pour équilibrer avec les morceaux les plus subtils (“Sand”). Si le public a un peu déserté le lieu, il reste une poignée d’irréductibles, qui auront bien mérité la rallonge du set de Thylacine, qui a jusqu’au bout assuré le spectacle. A revoir absolument !
C’est sur cette ultime et belle prestation que se termine Vie Sauvage pour moi, n’assistant pas à la journée “récupération” du lendemain. Mais une fois de plus, c’était bien, chaleureux et inspiré comme moment : à l’année prochaine donc.