Alors que le cinquième album de Motorama, “Many Nights”, fait déjà partie de ces disques précieux que l’on se garde pour aborder sereinement l’automne, et cela malgré des intentions un peu plus pop et polies que sur “Dialogues” ou “Poverty”, il est temps d’aller voir à quoi ressemble la musique du trio russe sur scène. C’est dans un Petit Bain complet que l’on tente de se trouver une place, entre le bar, la rambarde sur la droite, le stand merch’ et l’ingé son.
Faisant face au public avec juste un micro, Sharon Shy, alias “She Missing”, chante d’une voix distante et étrangement réverbérée tandis que son acolyte pilote une rythmique répétitive sur son ordinateur tout en jouant quelques lignes mélancoliques au synthétiseur. Elle marche calmement sur la scène, lui hoche la tête inlassablement, une vague de froid s’abat sur le public à mesure que cette musique s’installe progressivement dans nos cerveaux, évoquant à la fois Depeche Mode et un instant fugace et calme d’une rave perdue au fond d’un bois sombre. On se dit que leur premier album pourrait être une bonne raison d’attendre l’arrivée de l’hiver.
Malgré quelques soucis techniques avec leur synthétiseur et un petit tour de chauffe qui durera facilement cinq titres, Motorama gagne sur tous les terrains, que se soit celui de l’electro-pop d’obédience eighties, influence en provenance de New Order et consorts, ou de l’indie pop tristounette, celle où l’on enchaine les phrases de guitare claire, le tout en gamme mineure – on pense là au Felt première époque, celle où Maurice Deebank jouait encore avec Lawrence. On avoue un petit faible pour cet enchainement de “Voice from the Choir” avec “No More Time”, qui sont déjà nos chouchous sur le dernier album, mais le concert décolle franchement sur quelques vieux titres qui ne tarderont pas à gentiment chauffer la salle, et en particulier notre voisin de droite qui connait par cœur les refrains. Quelques “tubes” imparables parfaitement exécutés, on n’en attendait pas plus pour cette soirée, et c’est très bien comme ça.