Les indépendants face à la pandémie
Dans le domaine de la culture, au sens large, le couvre-feu puis le confinement ont compromis bon nombre de spectacles et de publications. Jusqu’à poser la question de la pérennité de certains lieux de diffusion, de quelques structures indépendantes et de projets artistiques. Dans les grandes villes, au ralenti, nous interrogeons musiciens, acteurs des sphères indés et autres pour prendre le pouls de la cité. Malgré le marasme, l’espoir demeure et des initiatives se font jour… qu’il est urgent de soutenir.
Bordeaux
Thierry Hosteins (à g. sur la photo), chanteur et guitariste de Oh Hank, membre actif de l’association Bordeaux Rock, ex-responsable de label (Odette) et tourneur (Josette).
Avant la pandémie, comment se portait la « scène bordelaise » ?
La scène bordelaise a toujours été très vivace, et ce, dans tous les styles. Pas forcément dans le bon goût, mais ça, c’est une autre histoire (rires). Peut-être un léger ralentissement dans les années 2010 ? Par contre, on constate que cette « scène bordelaise » ne concerne de plus en plus qu’un microcosme de plus en plus réduit, situé majoritairement autour de St-Mich’, où se retrouvent majoritairement les « bobos » et les enfants de ceux-ci, derniers tenants de la sensibilité rockeurs. Il semble que ce soit non-spécifique à Bordeaux : la place du rock, au sens large, au sein de son vivier le plus naturel, les kids, tend de plus en plus à se réduire un peu partout.
A Bordeaux, on constate depuis toujours que les groupes de kids naissent majoritairement en banlieue, dans ces cités dortoir lointaines, à une heure de bus. Ceux qui en veulent un peu plus que les autres ou qui sont un peu plus doués « montent » à St-Mich’ où se concentrent les activistes du truc : les vieux de la vieille et les nouvelles pousses.
Quelle est la situation actuelle de la ville ?
Là, il ne se passe strictement plus rien. Même lors de l’inter-confinement, il ne s’est pas passé grand-chose. Quelques concerts en extérieur ont pu avoir lieu, et quelques concerts à la sauvette dans les caves historiques. A noter que les locaux de répètes ont rouvert pendant cette période. Big up aux Barbey’s boys [la Rock School Barbey est une Smac de Bordeaux, NDLR] ! Le fantastique lieu qui s’appelait le Zoobizarre a définitivement fermé ses portes. Il s’agissait, à mon sens, du second lieu non-institutionnel d’envergure réellement internationale à mettre la clé sous la porte, après le Cricketters qui avait sombré dans les années 1990, sous les coups de boutoir non pas d’un virus mais plus prosaïquement de l’Urssaf. Un troisième lieu est apparu entre-temps, l’IBOAT. Longue vie à l’IBOAT et à sa programmation curieuse à 360°.
Sur la platine de Thierry : Steve Dalachinsky & RG Rough :
As-tu quand même des motifs d’espoir ?
Des collectifs de groupes très dynamiques émergent régulièrement (Flippin’ Freaks, We Are Vicious, Collectif du Fennec, etc.). Cette tendance de créer des collectifs de groupes est plutôt sympatoche. De nouveaux endroits émergent régulièrement, plus complexes, plus adaptés à cette drôle d’époque – comme l’IBOAT et les Voûtes –, des endroits multi-casquettes, type le génial bâtiment alloué à la fédération Pola, des auberges dissertantes – la Taupinière, la Tanière, le Chipi-chipi – à la manière de l’émergence de St-Germain-des-Près, dans les années 1950.
Comment peut-on soutenir ces initiatives ?
En sortant de chez soi ! En venant aux concerts, bordel. En achetant des disques ou des MP3.
Repéré par Thierry parmi la scène locale : Scarlatti Goes Electro
Quels sont tes projets du moment ?
Jouer avec les copains au sein de Oh Hank. À moyen terme, monter un lieu polyvalent rive droite, qui commence à vibrer, avec peut-être les copains de l’association Bordeaux Rock ?