Les indépendants face à la pandémie
Dans le domaine de la culture, au sens large, le couvre-feu puis le confinement ont compromis bon nombre de spectacles et de publications. Jusqu’à poser la question de la pérennité de certains lieux de diffusion, de quelques structures indépendantes et de projets artistiques. Dans les grandes villes, au ralenti, nous interrogeons musiciens, acteurs des sphères indés et autres pour prendre le pouls de la cité. Malgré le marasme, l’espoir demeure et des initiatives se font jour… qu’il est urgent de soutenir.
Nantes
Romain Lallement, musicien, plus connu sous le nom de scène de Lenparrot
Quelle était votre situation avant la crise ?
C’était plutôt pas mal, à vrai dire ! (rires) Je suis nantais depuis maintenant 17 ans, et l’une des raisons qui m’y fait rester est ce dynamisme serein – et la capacité d’aller à la découverte de nouveaux lieux, d’arpenter des quartiers qui se métamorphosent au fil des ans et offrent à cette ville une perspective nouvelle. Marina Martin à la programmation du Chien Stupide et de Lune Froide avait réussi à faire quelque chose de superbe, que ce soit pour la scène locale ou à une échelle plus large. L’arrivée de Wood Records et Comme à La Radio parmi les nouveaux disquaires est très réjouissante également.
Quelle est votre situation actuelle, et celle de l’ensemble des acteurs de la musique indépendante à Nantes ?
Culturellement parlant, c’est assez désertique. Tout est de nouveau reporté, certaines salles songent même à annuler toute programmation en intérieur de janvier à juin 2021 – avec la possibilité de maintenir ce qu’elles avaient calé si leur fermeture est levée, plutôt que de parier sur un énième remaniement qui risquerait d’être démoli comme les précédents.
Avez-vous quand même des motifs d’espoir ?
Oui, l’ouverture de ces mêmes salles aux artistes locaux pour des temps de résidence leur permet de réfléchir à leur pratique avec peut-être une autre perspective, ou de jouer tout simplement. Et, dans le cas des salles subventionnées, de faire des heures d’intermittence lors de leur venue.
Les copains de Confiné-e Records ont repris du service, ce qui a le mérite de motiver certains musiciens à continuer d’enregistrer en dépit du climat quelque peu anxiogène.
Comment peut-on vous soutenir ?
En tournant le dos aux grosses enseignes et leur logique d’attractivité carnassière, vous offrant tout ce dont vous pensez avoir besoin en restant le cul dans votre canapé. C’est tout autant possible en effectuant une démarche de soutien aux commerces que vous fréquentez en temps normal, qui se démènent pour offrir leur service en ligne avec l’option de retrait en magasin. À Nantes, je pense à mes ami.e.s de la librairie Les Biens-Aimés, mes disquaires chéris Mélomane, ou encore Vacarme – notre lieu fétiche ayant ouvert il y a tout juste un an.
Continuez-vous à travailler sur des projets en attendant une situation plus propice ?
J’ai eu la super idée de sortir un disque (“Another Short Album About Love”, NDLR) il y a une semaine (rires) ! Il devait sortir le 29 mai, nous avions déjà repoussé sa sortie une première fois. La situation pouvant encore durer un certain temps, j’avais à cœur qu’il voie enfin le jour. À défaut de pouvoir le défendre sur scène pour l’heure, je fais en sorte d’assurer sa promotion autant que faire se peut de chez moi. Dès que je le pourrai, je tâcherai de me remettre à écrire – tout ce marasme a parfois une fâcheuse tendance à éloigner de ce qui nous tient le plus à cœur.