Duo de Brinks entre Berlin et rives méditerranéennes. La bohème dé-territorialisée.
POPnews a 25 ans cette année. Je compte une vingtaine d’année de Brinksophilie et d’Herman Dunerie sous toutes ses formes. Comme cadeau d’anniversaire, octroyons-nous une petite folie : mesurer le nombre de centimètres de CDrs d’André Herman Düne/Stanley Brinks et autres avatars dans la discothèque (oui j’ai encore une discothèque, comme une Dvdthèque et même, folie !, une bibliothèque). Une bonne quinzaine. Et il m’en manque certainement la moitié…
22 Dune, 43 Brinks et associés… Non mais what the fuck ? Combien de chansons suis-je capable de chantonner (pour partie) ? Sans doute une cinquantaine au moins…
Donc 2 nouveaux Brinks rien que pour ce début d’année… Comme toujours, un prend le pas sur l’autre. Cette année, c’est « Taf Taf ».
« BC » n’est pourtant pas mal du tout. Hyper politique. Sans doute le plus ouvertement politique de Brinks depuis une bonne quinzaine d’années soit la période de son changement d’alias. Ce sont peut-être les constats post-guerre contre le co-vid qui imposent une virulence un peu plus marquée. Montée fasciste à la mode espingouine (“Todos quieren ser polis”, plus en phase avec la population que les ACAB et leur variante française « Tout le monde déteste la police » qui fleurissent sur les murs des villes) ou “Trouble in my bubble”, “One Civilization”. On retrouve le même désenchantement que dans les premiers Brinks, assez noirs, même si le ton ici est plus badin voire léger : une petite flûte aiguë, des chœurs qui le sont tout autant. La compagnie cosmopolite, de Berlin à Barcelone en passant par Athènes, permet sinon de relativiser au moins d’en rire… pendant qu’il est encore temps.
Stan se montre anar lover et c’est chouette. On retrouve un peu l’atmosphère de « Apocalypso », si ensoleillée. Stan en espagnol mais aussi Stan en français sur “Marionnettes”. Un français qui rrroule les rrrr, un peu chaloupé, cajun quoi. Voilà du nouveau (enfin… réécouter « New Cologne »), plaisant comme toujours.
Mais on préfère « Taf Taf »… qui ouvre de nouveaux horizons, me semble-t-il. Si “In Albania” vous donne envie de lever les coudes, mettre les bras à l’horizontale et taper du pied, tout va bien. Vous n’êtes pas en plein revival Kusturica mais avec le nouveau Brinks, plus méditerranéen que jamais. Finie la Berlinade : c’est une nouvelle fièvre, une ivresse de moiteur et de nuits torrides.
“In Athens” le confirme avec un sirtaki encuivré, des percussions démentes et fait le lien avec l’empuanteur du monde moderne du disque précédent.
There’s no love anymore, no space up in the air
And if anything happens
It happens in Athens
C’est bel et bien une fugue. Une fuite en avant. Ce que j’aime particulièrement dans les disques de Stanley c’est quand, soudainement, il prend son temps et étire une ou plusieurs compositions. « Taf Taf » est un album relativement long, et long en bouche également. Les percussions variées, les instruments à cordes aiguës, les cuivres, tout cela s’installe dans le temps. C’est particulièrement le cas de “I know who you are”, qui vient clore la face A, à inscrire parmi les merveilles des titres longs de Stanley Brinks (souvenons-nous de “French Leave” sur « Cooks »). Parfums capiteux et lancinants du vin rouge, des cordes et archets qui grattent, brouillard des cymbales, solo de cuivre grave. C’est une apparition diabolique, traitée musicalement comme telle : envoutante et engourdissante.
Sans transition (la face B), on retrouve des couleurs plus légères avec “Harem” où Stan se fait plat de substitution, side dish presque, pour son aimée, avant “Brighten my day”, qui fleure bon son “Egyptian Reggae” de Richman en VO, mais surtout nous évoque les comédies musicales de Youssef Chahine, drames joyeux, radieux et plombants comme le soleil des vicissitudes venues et à venir.
On ne se change jamais tout à fait et “Heart in your head” permet à Stan de yoddler sur des bongos. Tout va bien.
Puis on s’enfonce dans le surplace, le piétinement qui est transe, avec “You Drive me Crazy” et “If I was beautiful as you”, comme une remontée de “I know who you are”. C’est léger et pétillant, lourd et pataud comme une cuite. Lorsque le monde aura définitivement sombré, Stan et ses ménades, thyrses et mandolines en main, se promèneront ivres sur les décombres du pourtour méditerranéen. On les suivra, vivant de musique, d’olives et de vin et on mourra heureux enfin.
Avec l’aide de Johanna, ménate et ménade d’occas’.
« BC » est sorti numériquement le 1er janvier 2023. Un CD gravé avec les paroles peut-être commandées en écrivant à freschard chez gmail.com.
“Taf Taf” est sorti le 3 février 2023. Idéalement on commandera le CD gravé avec les paroles dans une charmante enveloppe bricolée en écrivant à Freschard chez gmail.com.
PS : 25 ans de POPnews c’est presque autant (en fait beaucoup plus) de chroniques de Stanely Brinks, Freschard, André Herman Düne, David Ivar, Herman Dune et même Herman Düne. On y trouve même la chronique de “Switzerland Heritage”, tellement central, inoubliable et inoublié. On vous invite à cliquer sur les onglets de bas de page.