Avec son quatrième album solo, l’Américaine Meg Baird nous offre un moment de complet ravissement avec ses chansons aussi belles qu’élégantes.
Comment fait-elle ? Posons les choses d’emblée : depuis son premier album solo “Dear Companion” en 2007, l’Américaine Meg Baird a en effet démontré une totale constance dans l’excellence, passant de l’interprétation d’un folk en guitare-voix à la simplicité désarmante sur cette œuvre inaugurale à une musique plus évanescente et immatérielle avec “Don’t Weigh Down the Light”, son troisième disque sorti en 2015. En cela, elle s’éloignait fort heureusement des longues processions guère joyeuses d’Espers ou du folk-rock psychédélique intense mais souvent boursouflé d’Heron Oblivion, groupes qu’elle avait contribué à fonder par ailleurs. Ce très haut niveau perpétué en solo par cette chanteuse originaire du New Jersey ne pouvait donc susciter qu’une très grande admiration ainsi qu’une réelle impatience d’entendre de nouvelles merveilles composées par cette artiste désormais installée à San Francisco.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’on n’a pas été déçu par “Furling”, le nouvel album de Meg Baird, tant ce disque est d’une grande richesse tout au long des neuf titres qui le composent. D’ailleurs, dès “Ashes Ashes”, nous avons droit à une éblouissante entrée en matière d’une grande liberté mélodique et harmonique, qui tutoie les cieux désormais rejoints par David Crosby dont le premier album solo “If I Could Only Remember My Name…” vient clairement à l’esprit à l’écoute de cette bluffante introduction. Et que dire de “Star Hill Song”, le morceau suivant, où nous sommes bercés pendant près de six minutes et où tout, dans le chant ou les arrangements, est d’une beauté confondante et profondément émouvante ?
Plusieurs des chansons de “Furling” donnent en fait simplement envie de se laisser porter, de s’abandonner en toute confiance à cette musique douce et accueillante qui ne cesse de nous ravir avec ses arrangements aussi discrets qu’élégants. Sur “Ship Captains”, c’est la voix aérienne de Meg Baird qui nous mène par le bout du nez, rappelant quelque peu celle de Jacqui McShee avec Pentangle. Sur “Cross Bay”, c’est sa maîtrise de la guitare acoustique qui accroche immédiatement, évoquant ainsi le meilleur de Joni Mitchell et confirmant son ancrage dans la tradition folk des années 60 et 70.
Meg Baird reste une chanteuse folk mais elle prouve avec ce disque qu’elle est capable de rayonner bien au-delà. Que ce soit avec “Twelve Saints”, encore un grand moment de complet ravissement marqué par son usage parcimonieux mais toujours juste du vibraphone, ou “Will You Follow Me Home?”, morceau assez chaloupé entre Neil Young et Cocteau Twins, l’Américaine sait démontrer l’étendue de tout son talent. Pour finir, avec “Wreathing Days”, elle nous quitte en toute liberté, béats que nous sommes après ce moment hors du temps passé en sa compagnie.
En ces temps de grande confusion et de perte de repères, il peut être nécessaire de trouver quelque chose à quoi se raccrocher. Même s’il est souvent illusoire de croire qu’un album puisse réconforter dans des proportions suffisantes, au moins avec “Furling” de Meg Baird, on sait que l’on a à la fois les pieds sur terre et la tête dans les étoiles. On sait aussi que l’année démarre fort avec ce très grand disque. Et c’est déjà pas mal.
Sur la platine de Meg Baird – POPnews
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