Loading...
InterviewsTrack by Track

Track by track – “Face à Aune” de Aune

Avec “Face à Aune”, Aune – alias Simon Carbonnel – fait une entrée remarquable et remarquée. Ce premier album a en effet tout pour lui : l’audace de mélanger sans compromis sons électro et textes barrés, une concision qui en concentre l’efficacité et une production puissante. On y perçoit des influences, de l’art de l’image poético-décalée de Bertrand Belin (“Chaussette”, “Machine à sous” ou “Oiseau noir”) aux racines électro pleinement assumées pour groove chaloupé (“Procession”) ou trip minimaliste (“Abeilles”), mais Aune garde toujours sa singularité et sa part d’étrangeté. Celle-ci passe par une trompette qui se glisse par surprise, une boucle obsédante ou des sons à l’origine incertaine, mais n’est jamais utilisée sans raison. “Face à Aune”, c’est neuf morceaux et 30 minutes sans rien à enlever, un des disques passionnants de ce début d’année. Et qui mieux que son auteur pour nous en dire plus ?


Jogger

C’est l’un des derniers morceaux que j’ai composés pour l’album.

J’ai trouvé un son d’accord de piano que j’ai samplé d’un vinyle de Barry Manilow. Je l’ai saturé et j’en ai fait une mélodie. J’ai joué dessus des mouvement de toms. Le morceau est né comme ça. C’est plus tard avec Bertrand Cauchois qui m’accompagne en mise en scène qu’on a échangé sur cette idée de “jogger”. C’était pendant le confinement et on en voyait partout, c’était cette période où on pouvait avoir une autorisation de sortie pour faire du jogging. 

Je me suis amusé avec la métaphore du jogger et l’obsession de la performance ; le besoin d’être le premier jusqu’à se perdre soi-même.


Je balance

Sur ce morceau, j’ai d’abord trouvé une boucle mélodique jouée sur mon synthé Matrix 1000. J’ai samplé aussi le vinyle de Baron Rétif & Concepción Perez pour le groove de rythmique décalé. Je l’ai découpé et retravaillé en ajoutant des percus plus électro et plus droites. Comme pour “Jogger”, j’ai d’abord travaillé sur l’instru. Je trouvais que ce morceau « balançait ». Je me suis amusé dans les paroles avec cette sensation de balancement.

C’est pour moi une chanson d’amour, un va-et-vient qui arriverait longtemps après la lune de miel, où la période d’idéalisation fait place à une routine amoureuse.


Abeilles

J’ai créé ce morceau après une demande de création sonore autour d’une ruche au sein du lycée Touchard-Washington au Mans. C’est le labo d’acoustique du Mans qui a fait les prélèvements sonores.

La base de ce morceau est alors clairement des sons d’abeilles qui volent ou tapent dans le microphone. 

J’ai rajouté ensuite des sons de synthé. Pour la ligne mélodique, j’ai utilisé mon Concertmate mg1, c’est un de mes synthés fétiches. Les sons des abeilles et les sons de synthé se marient bien, je trouve ! Je me dis que l’ondulation sonore créée par le battement des ailles des abeilles est sûrement assez proche de ce qu’on peut réaliser avec un synthé analogique …

Je ne voulais pas pour ce projet être dans une création très expérimentale qui se rapprocherait du drone. Mon défit était de faire donner envie de danser en utilisant principalement des sons d’abeilles.


Chaussette

Au début, ce morceau ne s’appelait pas “Chaussette”, mais il y avait cette ambiance un peu inquiétante que j’avais trouvé en modifiant un sample de Miles Davis et en utilisant des nappes de Roland RS505. 

C’est le seul titre sur lequel j’ai joué de la trompette.

C’est un morceau que j’adore faire en live car il est très cinématographique et permet de jouer avec la mise en scène.

L’idée de l’intituler “Chaussette” ajoute ce côté ironique que j’aime bien : cette ambiance est inquiétante mais la bête féroce s’appelle Chaussette.


Je te mouche

J’ai composé ce morceau principalement avec mon sampler (Digitakt). J’ai utilisé un synthé plus moderne pour la ligne mélodique : un Modor. J’ai aussi recherché des rolls de snares et des mouvements rythmiques qui appellent la danse.

C’est un morceau qui parle du consentement ! J’avais au début comme gimmick des jeux de paroles avec « oui »  et « non »… Des fois, je m’embrouillais. C’était pas top vu le sujet ! On a retravaillé le morceau avec Bertrand pour trouver ensuite des couplets pour le faire évoluer. En live c’est un morceau qui à la pêche et qui peut être directement adressé au public.

Je le place souvent après “Je balance”.


Oiseau noir

Parfois, le soir, un oiseau noir se perche sur le clocher en face de chez moi. Quand on l’observe par la fenêtre de la chambre, on distingue uniquement son ombre ! Son cri transperce le silence. C’est assez intriguant, beau, mais aussi très inquiétant. Il y a une ambiance très cinématographique.

Cet oiseau m’empêche réellement de dormir lorsqu’il est là ! 

Sur ce morceau, c’est moi qui lui crie dessus ! 🙂 


Procession

Suite à une commande de la EtAlors Cie et du théâtre des Quinconces au Mans, je devais créer un morceau pour l’ouverture de saison du théâtre. Je le jouais face à la cathédrale du Mans. Sur l’affiche des Quinconces, il y a avait un oiseau ! J’ai trouvé un vinyle avec des sons d’oiseaux de la nuit que j’ai samplé dans ma Digitakt. J’ai utilisé principalement la chouette hulotte et des sons de grillons qui font penser au güiro, J’ai créé la rythmique en dépitchant une rythmique de Miss Kittin aussi samplée en direct.

J’ai aussi trouvé avec mon Matrix 1000 des sons de synthés qui rappellent clairement des cloches de la cathédrale. 

Quand j’ai joué ce morceau les premières fois dans le jardin et face à la cathédrale, Marc Nammour qui présentait aussi ses compositions m’a rejoint pour un one shot sur ce morceau, c’était un super moment !

J’adore jouer ce morceau, en live c’est le premier du set.


Machine à sous

C’est le plus vieux morceau de l’album, l’idée de boucles de voix en lien avec ce thème me plaisait, et je n’avais pas encore utilisé de sons de guitare samplés. C’est par contre très récemment que j’ai rajouté ce son de synthé nappe qui arrive au milieu du morceau et qui « ouvre » la boucle.


Parade

Je ne fais jamais ça, mais là je me suis amusé directement à composer sur Ableton live des évolutions mélodiques en Midi avec mon Matrix1000 et mon Concertmate mg1. J’adore faire ça, mais d’habitude sur des séquenceurs hardwares, pas sur ordi.

J’aime bien ce morceau car il est très cinématographique et parce qu’on sent aussi clairement le côté boucle Midi qui devient entêtant.

J’avais vu le morceau qui finissait le concert d’Agar Agar (“Requiem”). Ils partaient de scène pour laisser cette boucle jouer, j’avais trouvé ça très classe. Comme si les machines prenaient le dessus et l’absence de groove humain clairement assumé nous plongeait dans un film de science-fiction.

C’est pour moi une valse de fin d’album qui rend hommage aux synthés que j’utilise.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *