Avec ce nouvel EP, le duo de San Francisco Flowertown confirme les espoirs suscités par la sortie l’année dernière de son merveilleux “Time Trials”, avec une musique douce, légère et épurée d’une constante beauté.
En mars 2020, à San Francisco, les groupes Cindy et Tony Jay avaient prévu d’effectuer un concert ensemble, concert qui n’a jamais eu lieu pour les raisons que l’on sait. Soumis à une inactivité que nous avons tous connue, Karina Gill de Cindy et Mike Ramos de Tony Jay commencent alors à échanger des idées de chansons et à écrire ensemble, s’envoyant régulièrement des enregistrements puis se décidant à graver leurs compositions sur un quatre-pistes dans le sous-sol de Karina. Sous le nom de Flowertown, le duo publie ces enregistrements sur deux EP en 2020. Après ces soties en forme d’ébauches encourageantes, Flowertown atteint rapidement sa plénitude dès son premier véritable album “Time Trials” en 2021. Sur ce disque, le groupe a su réunir le meilleur de la dream pop de ces quarante dernières années, de Felt à Mazzy Star en passant par Galaxie 500 et les groupes Sarah Records, pour une musique simple, mélodieuse et délicate démontrant, à chaque instant, sa capacité à nous charmer avec très peu.
Après ce premier album au rayonnement confidentiel mais à l’immense pouvoir de séduction, Flowertown se devait de maintenir ce niveau et de proposer encore au moins un disque d’une telle beauté. Cela est chose faite avec “Half Yesterday”, EP de huit titres sorti début juillet sur l’excellent label de San Francisco Paisley Shirt Records, comme les précédents. Huit titres en à peine plus de vingt minutes mais le groupe montre encore une fois qu’il lui suffit du minimum pour complètement nous toucher. Cela est également le cas sur le strict plan musical puisque, avec son instrumentation simple, légère et épurée, le duo fait sienne cette sobriété tant vantée (à défaut d’être appliquée) de nos jours, pour un résultat constamment éblouissant.
Le nouveau disque est construit sur une alternance entre des titres doucement entraînants et d’autres beaucoup plus calmes. Avec “Buttercream”, le morceau d’ouverture, nous attaquons le versant rythmé de l’EP avec ses belles guitares discrètement carillonnantes mais pleines de reverb. Lui succède “The Evergiven”, une berceuse comme en apesanteur où le chant susurré du duo, qui se partage le micro sur ce morceau comme sur les suivants, fait merveille. Comme troisième titre de cet EP, se présente “The Intersection”, un slow qui, tel un “A Whiter Shade of Pale” lo-fi, est parfait pour se lover dans les bras de l’autre. Ensuite, la chanson-titre du disque se révèle tout de suite très accrocheuse avec son rythme un peu plus enlevé et la limpidité de sa mélodie clairement dans l’économie, comme toujours chez Flowertown.
Puis, avec “Infinity Over Two”, nous entrons dans une ambiance envoûtante à la Mazzy Star, aussi confortable que mystérieuse, où le temps s’arrête alors que plane la voix plus langoureuse de Karina Gill. Après un “Beachwalkers” légèrement plus dynamique malgré une rythmique minimale, c’est l’auditeur qui plane complètement sur “Human Ties”, court morceau doux et ralenti qui démontre que le psychédélisme n’a pas de secret pour Flowertown. En conclusion de cet enregistrement, avec “Gaper’s Delay”, le groupe prouve surtout, notamment avec son chant très retenu, que ce sont l’épure et le dépouillement qui le guident continuellement.
Au final, avec “Half Yesterday”, Flowertown confirme qu’il est capable de faire au moins aussi bien que le merveilleux “Time Trials” sorti l’année dernière, cette nouvelle sortie illustrant parfaitement l’aptitude du duo de San Francisco à manier simplicité et douceur pour un résultat toujours aussi beau. En réalité, avec Flowertown, on s’enveloppe dans ses chansons comme dans un rêve. « It glows and shimmers just like a dream » chante à un moment Mike Ramos sur “Buttercream” : voilà un parfait résumé de la musique de Flowerown.