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Sur la platine de Ghost Power

Ghost Power, c’est le nouveau projet de Tim Gane (McCarthy, Stereolab, Cavern of Anti-Matter, Turn On…) et de Jeremy Novak (Dymaxion). Paru sur le mythique label Duophonic Super 45s – lancé par Tim et Laetitia Sadier aux débuts de Stereolab –, leur album sans titre (à écouter en bas d’article) présente dix instrumentaux ludiques et accrocheurs bourrés comme on pouvait s’y attendre de synthés vintage et de sonorités bizarroïdes. La plupart des morceaux sont assez brefs, même si le dernier, “Astral Melancholy Suite”, est une odyssée d’un quart d’heure en plusieurs mouvements qui pourrait donner des idées à des réalisateurs (Tim a d’ailleurs cosigné les B.O. de deux films de Marc Fitoussi avec Sean O’Hagan).
Cette sortie était l’occasion rêvée pour demander à ces deux esthètes et érudits du son de nous livrer une sélection de raretés d’hier et aujourd’hui. A lire, regarder et écouter ci-dessous.


Jeremy

Bronze – New Mexico

Bronze est un trio de San Francisco qui utilise batterie, voix et instruments électroniques faits maison. Ce titre est tiré de leur tout nouveau disque, “Absolute Compliance”, mais je suis fan depuis la toute première sortie du groupe, “Sides” (2009), un vinyle 10’’ dont la pochette de l’édition limitée était une véritable feuille de bronze. Les grooves étranges qu’ils produisent ensemble sont hypnotiques, avec un côté un peu sinistre, et les voir sur scène procure un plaisir rare.


Ruins – B.U.G.

Ruins est l’un de mes groupes préférés depuis leurs sorties sur le label new-yorkais Shimmy-Disc dans les années 90. Ce “power duo” est le projet du batteur Tatsuya Yoshida, qui a travaillé avec plusieurs bassistes différents. Ruins oscille entre un minimalisme implacable et un maximalisme explosif sur ce morceau qui pulvérise tout.


Deerhoof – Love Lore 2

Beaucoup de groupes ont fait des albums de reprises ou des mixtapes avec la musique d’autres artistes, mais avec Deerhoof cela sort de l’ordinaire. Quand, il y a deux ans, on leur a demandé de jouer un concert unique rendant hommage à leurs artistes musicaux préférés du XXe siècle, cela a donné “Love-Lore”, un brillant mash-up live orchestré qui tisse entre elles les compositions d’une sélection follement éclectique [dont, ici, la musique de la série “K 2000” !, NDLR] en un vaste bricolage. Je ressens un frisson particulier lorsqu’une œuvre d’art est capable d’éclairer les liens entre des idées qui sont souvent perçues comme appartenant à des sphères distinctes.


Fievel is Glaque – Hit Me Now

Fievel Is Glauque est un projet qui repose sur le claviériste Zach Philips et la chanteuse Ma Clement, avec le renfort de divers musiciens. Leurs miniatures pop jazzy à la fois resserrées et lâches procurent une sensation de musique très organique, elles arrivent à capter le son de la pièce où elles ont été enregistrées. Ce morceau de leur album de 2021 “God’s Trashmen Sent to Right the Mess” dégage un charme impénétrable.


Atrium Musicae de Madrid – Chacona

Né en 1944, le directeur de l’Atrium Musicae de Madrid, Gregorio Paniagua, est surtout connu pour ses tentatives de recréer de la musique grecque ancienne à partir d’une notation découverte sur des tessons de poterie. Peut-être a-t-il estimé qu’un tel territoire relativement inexploré lui offrait une plus grande liberté artistique, puisque ses albums de musique antique comportent souvent des synthétiseurs et d’étranges machines à produire de sons mêlés à des instruments traditionnels. Je ne peux pas prétendre que je comprends comment ce collage dingue s’est retrouvé sur un album de musique collectée auprès des peuples précolombiens, mais je me délecte de la pure absurdité de son existence. Les personnes intéressées devraient aussi rechercher l’album “Batiscafo” de Paniagua, sorti en 1980 et réédité en 2020. Il utilise à la fois des instruments anciens et modernes pour créer un hybride art-pop-dance unique.


Tim

We The People – My Brother, The Man

Excellent riff garage punk du groupe We The People, originaire d’Orlando en Floride. L’un de mes groupes de garage préférés des années 60. Ils ont fait tellement d’excellents morceaux au cours de leur courte vie, notamment le fameux “In The Past” qui a ensuite été adapté pour le single “La Fermeture éclair” de la chanteuse franco-belge Delphine en 1967.


Paul Martin – It Happened

L’auteur-compositeur-interprète new-yorkais Paul Martin a sorti cette tuerie de 1966 sur le petit label Impex de Philadelphie. Il paraît qu’il ne s’est vendu qu’à sept exemplaires à sa sortie… Il s’agissait au départ d’une simple démo enregistrée avec l’idée de démarcher d’autres artistes pour interpréter le morceau. Le riff fuzz est parmi les plus beaux jamais enregistrés.


The Painted Ship – Audience Reflections

Encore un groupe des sixties, originaire cette fois de Vancouver au Canada. Il n’a enregistré que deux merveilleux singles, celui-ci étant le second. Le premier, “Frustation”, est l’une des meilleures chansons jamais écrites, mais j’ai préféré sélectionner celui-ci pour son ambiance évoquant fortement les Silver Apples et son arrangement psychédélique inhabituel. Le leader William Hay a une façon unique de chanter qui m’a toujours rappelé Lawrence de Felt.


Captain Groovy and His Bubblegum Army – Captain Groovy and His Bubblegum Army

Ce groupe de “bubblegum” des années 60, complètement fabriqué, a enregistré un single pour les producteurs Kasenetz & Katz, célèbres pour leurs hits dans ce genre musical comme “Yummy Yummy Yummy” d’Ohio Express ou “Simon Says” de 1910 Fruitgum Company. Ce morceau bubblegum au son nettement plus dur a été conçu pour un personnage de la série de dessins animés de Hanna Barbera intitulée “Captain Groovy” (je pense que c’était à la fin des années 60), qui n’a jamais décollé.


The Baroques – Mary Jane

Cette face B [figurant également sur leur unique album sorti en 1967, NDLR] du groupe The Baroques, originaire de Milwaukee, est une superbe chanson, avec un piano électrique poignant et un chant mélancolique. Combien de morceaux aussi brillants sont juste tombés dans l’oubli…


Welfare State – Silence Is Requested in the Ultimate Abyss

Welfare State a été fondé en 1968 par John Fox et Sue Gill. C’était un collectif libre d’artistes indépendants produisant des événements spectaculaires à grande échelle en plein air, des performances radicales et des installations. Ils ont également sorti quelques disques et pour celui-ci, ils ont fait équipe avec les membres du groupe White Noise, David Vorhaus, Delia Derbyshire et Brian Hodgson. Il en résulte cet enregistrement assez inhabituel où l’on retrouve un peu les mêmes traitements de modulation en anneau et effets que sur l’album “An Electric Storm” de White Noise.


The Oracle – Don’t Say No

Produit par Curt Boettcher et Keith Olson, ce single de 1967 du groupe louisianais The Oracle a été écrit par Ruthann Friedman qui est aussi l’auteur du grand single “Carry On (Glittering Dancer)”. Il s’agit sûrement d’une des plus belles productions de Curt. La chanson ne cesse d’évoluer et est sans doute l’un des meilleurs exemples de sunshine pop avec les propres formations de Curt, The Millennium et Sagittarius.


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