Après les expérimentations bourdonnantes de Nivhek, Liz Harris revient de nulle part avec neuf chansons fantomatiques qui renouent avec le folk minimaliste de Grouper.
Les sorties récentes des films “First Cow” de Kelly Reichart et “Pig” de Michael Sarnoski (dans lequel Nicolas Cage part à la recherche de sa truie truffière) nous rappellent que, parfois, une cabane perdue en pleine nature peut avoir du bon. C’est probablement une source d’inspiration pour Liz Harris qui vit dans l’Oregon, entre la campagne et l’océan Pacifique, dans une maison isolée. Cette artiste prolifique enregistre depuis une quinzaine d’années une musique éthérée et assez lo-fi, faite de petites mélodies sur guitare acoustique et de drones bourdonnants. Elle revient aujourd’hui avec un nouveau disque sorti sur le label Kranky, “Shades”, dont les neuf titres semblent parfaits pour passer l’hiver à la maison.
“Shades” démarre avec le field recording introspectif de “Followed the Ocean” avant de laisser la place à une suite d’accords cagneux jouée sur une vieille guitare acoustique. Sur “Unclean Mind”, Liz Harris chante d’une voix réverbérée, noyée dans le mix mais toujours présente, et qui finit par nous hanter. On se laisse emporter par cette belle écriture entre folk et ambient, qui nous accompagne dans la pénombre avant de nous réconforter.
Il faut se laisser doucement emporter pour apprécier la musique de Liz Harris comme il se doit. On la traverse avec l’étrange impression de découvrir entre deux arpèges de guitare les paysages fantasmagoriques et intimes de l’artiste. Un appel à l’introspection joué par des cordes pincées que l’on accueille pour oublier les bruits du monde qui s’agite autour de nous.
L’Américaine termine calmement avec “Kelso (Blue Sky)”, avant de nous laisser seuls face au silence. Mais comme toutes les musiques qui habitent l’espace, celle de Grouper, une fois le disque terminé, nous accompagne encore de sa présence impalpable. Comme un rêve.