On avait laissé Bryce Dessner à son travail d’orchestration sur le dernier album de The National, « I’m Easy To Find », plutôt prévisible malgré quelques jolies chansons. On le retrouve avec surprise en compagnie du collectif Eighth Blackbird sur « When We Are Inhuman », un disque de reprises assez hétéroclites où l’on y croise Bonnie ‘Prince’ Billy, le pianiste Julius Eastman et Sufjan Stevens. Les compositions suivent les voies du folk minimaliste mais aussi celles de la musique contemporaine. Le notes de piano et les percussions sont répétitives et un orchestre de chambre se déploie lentement sur les premières notes. Le travail de recherche sonore est à la fois simple et raffiné.
L’exercice de reprise peut surprendre : écoute-t-on une réinterprétation stricte éclaboussée par des cordes furtives et un piano moderne ? Est-ce un moyen de nous faire redécouvrir certains titres sous l’angle de compositions à la fois minimaliste et orchestrale ? Difficile de répondre de manière totalement formelle, même si les titres de Bonnie ‘Prince’ Billy se redécouvrent comme au premier jour sous cette autre palette sonore. Cette musique possède la clarté mélodique où les guitares moelleuses s’accordent bien avec ces arrangements poétiques. S’il fallait garder un titre parmi tant d’autres, ce serait probablement cette reprise du titre traditionnel « Bank of Red Roses » où les instruments installent lentement un bourdonnement hypnotique et ambiant.
On termine donc par « Stay On It », une étrange comptine, une reprise de Julius Eastman, où Bryce Dessner, Bonnie ‘Prince’ Billy et l’ensemble Eighth Blackbird organisent une ballade grimaçante qui tourmente nos âmes jusqu’à la dernière note. Dans cette époque où l’on reste replié, sur soi-même on ira réécouter avec fascination la suite de ces accords sur la brèche.