On oublie difficilement les dissonances, les lignes de basse répétitives et les compositions qui trimballent dans nos oreilles leur blues plaintif et fantomatique. Que ce soit chez Can, Bastro ou Nick Drake, certaines figures de style sont immédiatement identifiables et l’écoute en boucle des disques de NLF3 et Prohibition nous rappelle combien ces groupes furent certains des plus beaux représentants de ces tropes musicaux dans le sillage de la pop savante française. Aujourd’hui, grâce à la sortie de « Rhapsody For The Dead Butterflies », le dernier disque solo de Nicolas Laureau – alias Don Nino et justement guitariste chez NLF3 et Prohibition – cette musique mélodieuse, expérimentale et étrangement nerveuse revient nous hanter.
On parle de nervosité mais il faut dire que les phrases de guitare entendues en boucle sur « Another Sleepless Night » nous font parfois penser à un reste d’angoisse pas complètement digéré. Est-ce dû à un enregistrement en pleine campagne normande dans une maison au calme, loin des contraintes de la ville ? Probablement, et si la ligne de basse sombre de « The Guys From The Company » sonne comme un lointain souvenir d’un travail harassant, « No Yin No Jing », « Shining Horse » et surtout « Through the Delta » ouvrent progressivement les fenêtres, laissent rentrer un peu de chaleur et signe un retour à la nature bienfaisante.
Tout « Rhapsody For the Dead Butterflies » semble marqué par cette recherche d’équilibre entre le groove sobre de ces basses post-punk, la lente hypnose des boites à rythme, les mélodies légères jouées sur des guitares minimalistes, l’ouverture ambiante des synthétiseurs et cette voix introspective dont chaque respiration semble gagnée par le vent qui souffle dans le jardin à côté du ruisseau. En dix titres et une quarantaine de minutes, Don Nino boucle un grand disque de richesses sonores que l’on réécoutera jusqu’à sa définitive incrustation dans notre mémoire.
Don Nino – A Beautiful Cloud – POPnews
[…] pour les fétichistes. Effectivement, on s’est éloigné des luxuriances des albums précédents (“Rapsody for the Dead Butterflies” et “In the Backyard of Your Mind”) mais pas tant. C’est là que la patte du maître joue […]