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Lawrence : “La pop music n’est pas un sujet de plaisanterie”

Le samedi 22 septembre, le très rare Lawrence (ex-Felt et Denim) se produira avec sa formation actuelle Go-Kart Mozart en tête d’affiche de la deuxième soirée – complète depuis des semaines – du festival Popfest, à Paris. L’occasion de ressortir des archives de POPnews cette interview réalisée lors de sa précédente venue, il y a plus de douze ans, dans des conditions un peu particulières…

Au Panthéon des losers magnifiques du rock, Lawrence Hayward (plus « connu » sous son seul prénom) devrait s’assurer une place de choix. Il y eut tout d’abord Felt dans les années 80 : dix albums (souvent concis) et dix singles en dix ans, et à peine plus de ventes. Il s’agit pourtant de l’un des plus beaux coffres à trésors cachés de cette décennie injustement honnie : pop songs lumineuses, instrumentaux pointillistes, longues plaintes new wave, Lawrence et sa bande auront fait un peu de tout, et souvent très bien. Suivra l’aventure Denim, au succès tout aussi relatif malgré des premières parties de Pulp et un album inaugural rempli d’hymnes glam faussement ironiques (« I’m Against the Eighties »). Depuis quelques années, l’inaltérable Lawrence s’est réincarné en Go-Kart Mozart. En cette année anniversaire du plus célèbre et célébré des compositeurs, l’argent et la gloire vont-ils enfin frapper à la porte du songwriter anglais ? Ce ne sont pas les conditions particulières du concert donné à Paris par Lawrence et ses acolytes à l’initiative du magazine “Magic” qui pourront permettre d’y répondre aisément (voir les détails tragi-comiques dans l’interview), mais une chose est sûre : notre homme y croit, et cet entêtement a quelque chose d’à la fois dérisoire et magnifique.

Tu as rendu visite à ton roadie à l’hôpital aujourd’hui. Comment va-t-il ? Et toi-même ?
Lawrence : Nous en revenons, en effet. Il est en soins intensifs et vraiment traumatisé. Il est tombé du balcon du quatrième étage dans la nuit. C’était notre premier gig à Paris en tant que tête d’affiche, une occasion vraiment particulière et c’est devenu catastrophique. Tellement de choses ont mal tourné (un accrochage en taxi, un bassiste malade, ndlr) et cela se termine par une défénestration. C’est vraiment fou, vraiment fou. Et c’est plutôt horrible de voir cet ami allongé sur un lit d’hôpital, avec quelque chose qui lui maintient le cou et des tuyaux un peu partout. Je ne sais pas combien de temps il va rester à l’hôpital, mais il ne sera certainement pas notre roadie pendant un moment. C’est tout. Et notre bassiste qui n’a pas pu faire le deuxième set hier tellement il était malade…

Comment as-tu trouvé le concert ?
C’était vraiment difficile. Nous avons été obligés de faire le deuxième set sans le bassiste, et le clavier a dû essayer de faire de la basse d’une seule main, ce qui est presque impossible, à moins de s’être entraîné avant. Je voulais faire cela avec tout le groupe, bien jouer, profiter de cette belle occasion à Paris. Et finalement, cela n’a pas été possible. Nous n’étions pas dans nos pleines capacités pour le deuxième set.

Il y avait pourtant du monde et certains semblaient très contents.
Pas moi. Il y avait trop d’avanies, de tension pour que je puisse y prendre plaisir.

Vous aviez déjà commencé à vous produire en Angleterre, n’est-ce pas ?
Oui, nous avons donné des concerts sous différents noms. Nous nous sommes appelés Fuzzy Ducks à Brixton, juste pour un essai, et ça a été un très bon gig. Et puis, incognito, nous avons ouvert pour Belle & Sebastian à l’Hammersmith Odeon à Londres. Paris était notre premier concert en tête d’affiche. Nous ne jouions ensemble que depuis quelques mois et nous avions pensé faire un premier set plus court, pour nous chauffer, vérifier que tout fonctionnait bien, et ensuite nous pensions délivrer un vrai set, plus étoffé et maîtrisé.

Te rappelles-tu les autres fois où tu as joué en France ? Je crois savoir que tu t’es produit à Reims en 1986 et à Paris à la fin des années 80, lors d’une édition du festival des Inrockuptibles…
Ce devait être avec Felt en 1989. Les La’s ouvraient le show, puis c’était le tour de Felt et enfin les Stone Roses. Ce fut une nuit fantastique, brillante, un très bon show. Et avant cela, nous avions fait effectivement un petit tour en France. Mais où… (après s’être fait épeler le nom de la ville de Reims)… Mais oui, j’avais dormi dans cette grande cachette tout seul, sans lumière. C’était un très bel endroit. Nous ne pouvions pas rester dormir la nuit, nous étions partis et je commençais à en avoir marre. Je ne voulais pas partager une chambre avec les autres, et le propriétaire d’un bar où nous avions atterri m’avait laissé dormir dans une pièce à part, tout seul, sans lumière. Au milieu de la campagne. C’était très beau, la Champagne. Je devrais vivre là.

J’étais surpris de te voir hier sur scène si sérieux, impavide, dans un concert assez second degré.
J’étais un peu perturbé hier. Je n’ai pas forcément l’habitude d’être si sérieux. Les concerts en Angleterre étaient bien différents, et celui-ci représentait beaucoup, avec beaucoup de pression et trop de problèmes survenus en chemin. Mais je suis resté drôle tout de même, je crois, notamment quand j’ai dit à la fin qu’il gelait, alors que c’était sans doute le concert le plus irrespirable que j’ai fait, je suais à grosses gouttes. Enfin, personne n’a relevé la blague, il est vrai. Mais je n’aime pas beaucoup parler. D’ailleurs, je ne pense pas qu’il faille être drôle, Lou Reed ne l’est pas par exemple. La pop music n’est pas un sujet de plaisanterie. En l’occurrence, ce sont plutôt les paroles des chansons qui véhiculent l’humour, bien qu’elles soient aussi sérieuses.

Il y avait Jarvis Cocker dans le public hier. Il semble t’apprécier. Tu le connais bien ?
Nous ne sommes pas de grands amis, mais nous nous connaissons. C’est un mec gentil et serviable. Il connaît bien notre musique. Il fait bien son boulot de DJ aussi.

Hier soir, avant vous, il y avait un groupe nommé Part-Time Punk. En écoutant Go-Kart Mozart, je me suis dit : là, c’est du Full-Time Punk.
Oui, nous sommes punk à plein temps.

Est-ce que ça correspond à la musique du groupe ? Certains parlent de glam-rock, d’autres de brit-pop, mais ça a un côté très punk aussi, non ?
Pas vraiment. C’est plutôt du robot-rock, de la pop music un peu rocky sur les bords. J’ai grandi dans la musique punk et je l’adore, mais je ne peux pas dire que ce soit la musique que je fasse. J’appellerais cela du « novelty rock » , un nouveau genre de musique.

Qu’est devenu le projet « Denim Take Over », dont certains des morceaux se trouvent sur le dernier Go-Kart Mozart ?
C’était le nom du troisième album prévu pour Denim (le troisième disque réellement sorti s’appelant « Novelty Rock », ndlr), mais il n’y avait pas de liste définitive de chansons. J’ai essayé de trouver de l’argent pour mener le projet et ai conçu deux CD-R de démos à partir des chansons de Denim que j’avais. Certains morceaux ne devaient pas figurer sur le disque prévu, d’autres se sont retrouvés sur le Net, etc. Il n’y avait donc pas d’album, mais une idée, un projet. Si nous étions restés chez EMI, l’album suivant se serait appelé ainsi mais je ne sais pas quelles chansons auraient figuré dessus. Donc il n’y a aucune version officielle de « Denim Take Over ». Sur le prochain Go-Kart Mozart, il y aura sans doute encore quelques chansons écrites il y a longtemps, mais il n’est pas question de ranimer le projet « Denim Take Over « . Cet album n’existe pas.

 

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