Avec son comparse Ola, Carl Johan de feu-Vit Päls profite de son congé paternité pour enregistrer un album romantique dont le titre donne en français quelque chose comme « Histoires d’amour dans un ordre non chronologique depuis l’éveil sexuel jusqu’à aujourd’hui ».
On y trouve plein de sucreries pop comme à l’habitude. « Nåt att dansa till », par exemple, presque du Vit Päls, qui nous conte l’envie de sortir et de danser dégagée du besoin de séduire, pendant que son aimée reste à la maison à regarder la téloche. Oui, ceci est un disque programme.
Mais ce qui nous réjouit le plus, ce sont les morceaux s’éloignant davantage de la bonne soupe pop primordiale pour se colleter à des ambiances plus moites. Depuis « Avancerad Magi », Carl Johan et ses complices ont mis leurs doigts dans la prise de l’électro et leurs compositions ont chopé la danse de Saint Guy (-Man). Il y a toujours eu quelque chose de dansant et de festif (je vous vois froncer les sourcils : on pense ici au « Party in the USA » de Jonathan Richman et non à la Bande à Basile officiant en Tryo) mais quelque chose se précise davantage dans le cadre de la leçon Goddard/Taylor administré depuis des années, soit du Nerd blanc toujours un peu handicapé des hanches mais dont le cortex est branché en permanence sur les percussions du Ghana. En résulte « Äntligen », machine à danser Lo Fi qui ne fera pas fureur dans les blockparties mais déchaînerait bien les foules au festival Way Out West de Göteborg en première partie de soirée, disons avant Hot Chip (ou simplement, voire vraisemblablement, dans un bar indie de Malmö).
Les paroles sont, pour ce qu’on peut en attraper, toujours bien vues, amusantes et capturent toujours autant, sinon l’air du temps (perdu), au moins la vie (retrouvée) de Carl Johan.
Que ce soit avec une guitare (seule ou presque) sur « Som Alla Andra » (« comme tous les autres »), superbe finale, ou avec tout l’apparat du mini studio, les chœurs, les bongos comme du temps du premier album et la nostalgie d’un premier été amoureux comme sur Hot Daang, Carl Johan touche et fait feu de tout bois, y compris des vielles cassettes de caméscope :
On trouve aussi une bombinette, « Spela Shoreline », presqu’inaccessible à nous autres d’Outre Scandinavie, au texte farci de références aux groupes inexportables et inexportés (ou qui aurait dû le rester cf le gros dans Ace of Base) comme Håkan Hellström et Broder Daniel, dont on vous colle le titre qui déchaîne les foules d’ici. Vous vous ferez votre idée.
Pour ma part, j’aime aussi beaucoup « Efter Festen », avec son saxophone inattendu et sa solitude qui prend une allure presque métaphysique alors qu’on parle, je crois du moins, de la folie des départs pour la cambrousse qui prend les suédois à date plus ou moins fixes et laissent les villes vides ainsi que certains désœuvrés et autres cœurs solitaires aux prises avec leurs pires démons.
Encore un album dont on parlera peu et certainement encore moins en terres Macroniennes mais qui vaut plus que quelques écoutes sur votre lecteur en ligne préféré. Un LP est disponible sur Det Svenska Musik Undret et Hybris. Faites-le vôtre.