En découvrant les dix-neuf titres du nouvel album de Ty Segall – un rendez-vous quasi-annuel auquel on répond présent presque systématiquement – on pouvait craindre la surchauffe. On avait même fini par croire qu’à force d’invoquer le fantôme de T-Rex, Ty laisserait tomber ses premiers amours, ce rock garage que l’on avait tant écouté à ses débuts. On imaginait déjà le pire, devenu une sorte de Jack White perdu dans une nostalgie sous chloroforme. Mais que l’on se rassure, Ty Segall tient toujours le haut de la barre et son dernier disque, « Freedom’s Goblin », se termine une fois de plus dans le rouge.
Si choisir c’est renoncer, alors Ty Segall ne renonce pas et nous livre un ensemble de morceaux qui passent d’un genre à l’autre sans trop calculer, quitte à parfois nous laisser au bord de l’indigestion. On y entend du rock, du glam, du punk, du folk et même une sorte de proto-disco malsaine sur « Despoiler of Cadaver ». L’efficacité est une fois de plus de mise pour ce déluge d’électricité et on fera peu d’efforst pour choisir un titre plus qu’un autre même si « The Main Pretender » mériterait d’être joué chaque matin, notamment grâce à ce saxophone joué par Mikal Cronin et dont on ne tarira jamais assez d’éloges sur ses talents de compositeur.
Mais il faut attendre « And, Goodnight » pour rendre définitivement les armes. Toujours au bord de l’implosion, Ty Segall se lance dans un long titre psychédélique sous forte inspiration de Neil Young et de son Crazy Horse, période « Everybody Knows This is Nowhere ». Lorsque les dernières notes finissent de résonner dans ce coin perdu de notre cerveau, on finit par se dire que, pour qui le bruit est le plus beau des sons, cette musique donne l’impression de crier plus librement que nous ne le ferons jamais.