On aurait du se douter que la soirée allait être bonne en arrivant à l’iBoat et en voyant un Bigott déjà hilare, dansant tout seul sur le pont. Il faisait chaud, il faisait beau, le lendemain était férié mais il n’y eut pas grand monde pourtant pour s’aventurer dans la cale du bateau. Ils le regrettent probablement aujourd’hui, car la formation espagnole au complet a joué un set qui a validé un talent sans faille pour la pop élégante.
Après l’ouverture de la soirée confiée à Clipperton, c’est Bigott en quatuor qui monte sur scène. Comme “My Friends Are Dead”, huitième album de la formation, est encore frais dans les mémoires, le groupe choisit fort logiquement de lui faire une place de choix dans la setlist, qui comporte aussi de nombreux titres de “Pavement Tree” (2014). Chaque titre vient rappeler une même évidence, à savoir que l’Espagnol a un talent d’écriture certain, qui évoque souvent l’excellent Jeremy Jay (mélancolie qui pointe, claviers réconfortants sur guitares cristallines), mais aussi R.E.M. ou des artistes plus folk. Qu’il s’agisse des formidables “Baby Lemonade”, “Pavement Tree”, “At the End” ou “Will Anything Happen”, il y a toujours une même faculté à écrire des chansons de moins de trois minutes, parfois fichtrement entraînantes, parfois juste ciselées pour lâcher une petite larme dans sa bière.
Les trois musiciens qui accompagnent Borja Lando, l’âme de la formation, sont irréprochables dans leur précision, mais c’est bel et bien son leader qui amène la dernière touche à la formation. Bigott est un formidable groupe de pop songs, son leader est lui un trublion incroyable, aussi drôle que décalé, le sourire aux lèvres en permanence. Il passe d’un anglais baragouiné (ce qui n’est pas le cas quand il chante) à l’espagnol, lâche quelques mots en français (“je t’aime ! France !”) et nous invite à le suivre sur Instagram – ce que je pense tout le monde a fait, et fait même monter une jeune fille sur scène. Avec un set généreux de plus d’une heure et quart – ce qui fait pas mal quand on a des chansons de 2’30 en moyenne -, Bigott aurait pu diluer, mais bien au contraire, chaque chanson conforte le sentiment de tenir là un sacré joyau pop. Tout le public a droit à son accolade, à son selfie, et c’est une trentaine de spectateurs heureux qui repart de l’iBoat. Bigott, héros pop anti-déprime : c’est validé, et rendez-vous est déjà pris pour une nouvelle consultation.