Avec ce premier disque en solo, « Songs from la chambre », le Vosgien Julien Bouchard confirme les talents de mélodiste que l’on avait pu deviner dans ses projets passés.
Nombre de disques ont été conçus dans l’intimité d’une chambre, entre quatre murs comme le cocon matriciel. On pourrait être bien surpris de découvrir les conditions d’accouchement des grands disques qui nous accompagnent depuis toujours. Prenez « The Software Slump » de Grandaddy enregistré dans un studio minuscule guère plus grand qu’un appartement parisien mal fagoté. Vous savez ces endroits exigus avec le ballon d’eau chaude qui prend toute la place. C’est dans une chambre, dans une même unité de temps et de lieu que s’est longuement construit « Songs from la chambre » de Julien Bouchard, repéré aux côtés de Coco Business Plan. Je vous citais plus haut Grandaddy, il y a assurément une parentalité entre les deux projets pour ce même sens d’une ligne claire chargée de vapeurs.
Jamais très loin d’une Pop Sixties rayonnante, Julien Bouchard balade sa musique élégante et racée qui devrait plaire aussi bien aux amateurs de l’école anglaise qu’aux éternels apatrides. On cherchera ici et là quelques empreintes d’un Paul Weller, les réminiscences des premiers Elton John (si si). Instantanément charmant, « Songs from La chambre » est typiquement le genre de disque dans lequel on se reconnaît immédiatement. De ce « 100 Regrets » comme un clin d’oeil aux Lightning Seeds d’Ian Broudie à « Stolen Love » ou « Handguns » qui va piocher dans les souvenirs de la Pop des années 70 et parviennent à faire d’un solo de guitare quelque chose qui n’est plus ringard.
On pensera parfois au « Lost In The Dream » d’Adam Granduciel pour cette réussite dans le recyclage de vieilles recettes un peu désuètes. Julien Bouchard, presque l’air de rien, crée des arrangements à la fois simples, évidents mais diablement perspicaces comme ce pont aérien sur « Always ». On croira parfois entendre un Bertrand Belin moins poseur et peut-être plus touché par le Rock américain des années 90 comme sur « Si loin de toi ».
Julien Bouchard joue avec les exercices de style, passer d’une ligne très pop à un folk dépouillé et bucolique sur « Color of the sound » à un « Fear » cinéphile tout en ruptures quand il ne dépeint pas le trivial dans « Blind Kids Of The Stadium ». Avec « Songs From La Chambre », Julien Bouchard emporte notre adhésion avec une Pop solaire mais jamais anodine que ce soit sur « Hungry Men » et sa joliesse de décor. « Party Freaks » remémore les créatures de déglingue de Eels. En clôture de ce disque assez proche de l’amical, « Prendre le temps » fait la synthèse d’un certain son West Coast avec un spleen bien européen.
Julien Bouchard signe une première étape qui le pose en styliste et en mélodiste parmi les plus élégants que vos oreilles rencontreront cette année, raison de plus pour retrouver le calme serein des quatre murs douillets de notre chambre..