Loading...
Disques

Albin De La Simone – L’un de nous

Albin De La Simone De La Simone - L'un de nous

De cette « nouvelle scène » française, l’une des figures les plus attachantes reste assurément Albin De La Simone qui promène sa silhouette de Dandy commun, de bon copain qui habite au coin de la rue. Il revient ici avec « L’un de nous », soit une collection de chansons délicates et fragiles.

Ce qui est peut-être le plus difficile à restituer, c’est le quotidien dans ce qu’il a de plus trivial et commun sans pour autant tomber dans une posture misérabiliste ou dédaigneuse. On ne sait trop ce que l’on va chercher dans les vignettes musicales d’Albin De La Simone mais sans doute que l’on y trouve quelque chose, vu que l’on y revient à chaque fois avec plaisir. Albin De La Simone, c’est un peu la rencontre entre un Pierre Richard lunaire et un Alain Chamfort délicat.

Les mots en « isme » comme libéralisme, populisme n’en finissent pas de vous lasser, les « Gate » de toute nature vous épuisent. Sans doute, « L’un de nous », nouveau disque de Albin De La Simone, pourra se vivre comme un manifeste à une certaine forme d’indolence. Albin De La Simone parle des gens qui se lèvent tard, les sensuels sans ambition. Il raconte l’homme face aux femmes, ses petites trahisons, le paréo qui se soulève avec le vent, les promesses d’une respiration haletante.

Albin De La Simone se raconte avec distance, une ironie tendre. Du « Grand amour » en ouverture du disque à ce dialogue avec le doute « Dans la tête », ces thématiques de quarantenaire, ces obsessions en surpopulation quelque part au fond du crâne. Il perpétue cet héritage d’une chanson tranquille et profonde à l’instar d’Anne Sylvestre ou Moustaki. De sa collaboration avec Miossec pour « Ici-Bas, Ici Même », il a retenu la sincérité de l’épure. Lui qui dit à l’envie avoir chercher le « Wanted charmant piano droit étouffé » pour la musique qui habitait ses doigts.

Lui qui a su maîtriser la légèreté dans ses chansons, savamment doser une spontanéité. Savoir dire ses suffisances, les quelques certitudes. Il dit les renoncements à l’amiable. Ces vies qui dorment dans les baignoires, se retrouvent à tâtons dans le noir d’une chambre comme dans l’exquis « Les chiens sans langue ». 

Albin De La Simone est un homme à femme mais n’y voyez pas un goût de la collection ou une forme de misogynie, encore moins l’expression d’une virilité machiste. Albin De La Simone raconte la femme, celle que l’on aimera « une vie entière, au moins l’aimer bien. En tout cas mieux qu’hier, moins bien que demain ». 

Albin De La Simone est un homme à femme, rien de surprenant donc à le voir collaborer avec tant de femmes, pour elles et avec elles mais aussi sur ce disque. Des plus connues, Vanessa Paradis ou la fidèle Emiliana Torrini. On pourrait aussi parler de Mara Carlyle, de Milamarina ou encore de la pochette de Sophie Calle. Mais on s’attardera sur Sabina Sciubba, également du groupe Brazilian Girls avec ce dialogue murmuré d’une beauté vacillante, « A quoi » où la voix en falsetto d’Albin De La Simone se laisse submerger par le ton grave de l’italienne.

Albin De La Simone, c’est un peu l’antihéros involontaire avec cette poésie du quotidien qui s’installe malgré lui. Prenez « La fleur de l’âge » qui raconte si peu, une Pop song en apesanteur ou le surréalisme doux de « L’un de nous », cette « chorale à trois cuisses qui chante l’amour de l’anus à coulisse », cet humour savoureux mais jamais moqueur, quelque chose de presqu’inoffensif.

Albin De La Simone chante l’indolence d’une Bossa Nova douce, une variété sans échelle de bon goût, cette école qu’il partage avec Alex Beaupain ou Alma Forrer. Il réussit à être suave mais aussi subtil avec des textes plus acerbes que doux comme ce « Pourquoi on pleure ». Il y a chez lui cette capacité à l’évitement, le détournement d’une situation qui deviendrait impudique, cette empathie sarcastique, cet élan pince-sans-rire qui rend encore plus attachantes ces diapositives qui nous ressemblent beaucoup.

De disque en disque, Albin De La Simone trace le portrait pastel de ses angoisses qui sont aussi un peu les nôtres. On ne sait trop ce que l’on va chercher dans la musique du monsieur mais on y trouve toujours des merveilles à l’image de ce « L’un de nous » lumineux, piquant et délicieux.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *