Avec ce troisième album de Winter By Lake, Nicolas Cancel amène toujours plus loin sa musique, vers plus d’arrangements et de profondeur.
C’est quoi au juste un album concept ? Une idée que l’on étire tout au long d’un disque pour lui faire rendre l’âme ? Une histoire que l’on raconte ? Des personnages qui prennent corps, qui prennent sens ? Le théâtre de mille et un sentiments comme des millions de pixels qui couvriraient un écran ?
Avec « The journey of Mister Wine », 3ème album de Winter By Lake, Nicolas Cancel, à la tête du projet se confronte à cette notion de l’album concept. On retrouve avec plaisir ce même univers à la fois synthétique et organique qui rappellera parfois les premiers Sébastien Schuller. « The journey of Mister Wine » porte bien son titre car bien plus qu’un simple album concept, ces onze titres sont comme autant d’instantanés de moments de vie. De celui qui se brûle au feu d’un volcan, de celui qui cherche parfois refuge dans le silence, parfois dans un paysage bruissant.
A la fois cohérent et dispersé, ce troisième disque de Nicolas Cancel irradie d’une force nouvelle, là où parfois la musique de Winter By Lake masquait ses charmes derrière une austérité en trompe l’œil. Ici, tout ressemble à une cavalcade contre l’immobilisme et le désespoir. Autrefois plus minimal, le territoire de Winter By Lake s’enrichit ici d’arrangements tout en subtils détails entre ornements électroniques sur « A Stone » qui convoquent la magnificence passée de L’Altra. La voix en retrait, comme en dedans, ranime nos adolescences New Wave. Pourtant, nulle formule passéiste pour autant, aucune velléité de copiste. Winter By Lake nous propose bien plus que cela et prouve encore une fois si c’est nécessaire toute l’étendue de son spectre musical entre Slowcore, Folktronica et Post-Rock.
Structurées autour d’idées toutes simples, ces onze titres ont ce charme direct des grands disques Pop. Pensons aux arpèges de guitare sur le somptueux « Colors ». Winter By Lake maintient notre attention aux aguets tout au long du disque par cette constante cyclothymie dans les inspirations qui forment ces titres. Il sait être contemplatif sur « Down The Street » proche des premiers Low quand il ne tend pas vers une urgence sourde sur « Fire ». Nicolas Cancel transporte sa musique vers des couleurs nouvelles.
Il y a donc cette voix en dedans, froide, presque sèche, à la limite du Spoken Word, dans une espèce d’entre-deux ambigu comme un inconfort nécessaire. Ces inconforts qui permettent notre réappropriation des espaces d’un autre, un peu à l’image des acteurs qui donnent cette fausse impression de ne pas habiter leurs mots pour mieux nous laisser les posséder. Puisque nous parlons d’inconfort, les grands disques Pop ont souvent ce rapport presqu’inconscient à l’ennui, à la monotonie. Ils rendent à cet état d’être ses lettres de noblesse, cette capacité à ouvrir notre esprit et nos sens à ce petit tumulte aux traductions à décoder.
Nicolas est de ceux-là. Il constitue des aquarelles sonores et fait rimer atonie avec empathie.