Distingué par les plus prestigieux de ses pairs, de McCartney à Costello, Ron Sexsmith enquille depuis vingt ans les albums avec la constance et l’humilité des meilleurs artisans de la pop. Sorti au printemps, “Carousel One” n’apporte pas de grands bouleversements à la formule du Canadien, mais le montre d’humeur plus joyeuse et légère qu’à l’accoutumée. Même si une certaine frustration subsiste, peut-être a-t-il fini par accepter son sort, des ventes qui ont rarement été à la hauteur de critiques généralement excellentes. Devenu quand même plus ou moins prophète en son pays, ainsi qu’en Grande-Bretagne, Ron Sexsmith reste en France un artiste assez confidentiel, ses fans fidèles peinant à remplir le New Morning lors de son dernier passage parisien – le même soir que… Blur au Zénith ! Quelques heures avant ce concert de grande classe, nous le rencontrions pour une demi-heure d’interview, l’occasion de revenir sur sa riche carrière, sa conception de la musique, Feist, les Byrds, One Direction (!), ses débuts de romancier ou le rôle de ses producteurs.
Ta discographie donne une impression de continuité et de régularité, cependant chacun de tes albums a une tonalité particulière. Tu y réfléchis beaucoup avant de débuter un nouvel enregistrement ?
Pour chaque nouvel album, je cherche à faire quelque chose de différent du précédent, même si ce n’est pas d’une façon radicale. Par exemple, le disque d’avant était très orchestré, avec des arrangements de cordes et de vents, beaucoup de ballades, un son plutôt acoustique, et il succédait à un album produit par Bob Rock, au son plus lissé et plus électrique. Quand j’ai les chansons, j’essaie de trouver la meilleure façon de les mettre en valeur, de leur rendre justice, avec l’instrumentation qui convient… Travailler avec différents producteurs m’aide aussi à obtenir des atmosphères variées.
Ton nouvel album semble plus léger et lumineux que les précédents, et c’est la première fois que tu souris sur la pochette… A-t-il quelque chose de particulier pour toi ?
En réalisant ce disque, je me suis en effet aperçu que les chansons étaient plus joyeuses que d’habitude. Mais ce n’était pas pensé en amont, et je ne saurais pas trop expliquer pourquoi. Je pense qu’il y a toujours eu de l’humour dans mes textes. On parle souvent de mélancolie à leur sujet, mais ça ne me semble pas totalement juste. D’autres songwriters sont beaucoup plus sombres et déprimants que moi. Concernant la pochette… en fait, je ne suis pas très doué avec un appareil photo, et j’ai pris moi-même ce portrait avec mon ordinateur. Il n’était pas destiné à se retrouver là, je l’avais juste posté sur Twitter et quelqu’un du management m’a suggéré de l’utiliser. Comme c’était de la basse résolution, on a dû le retravailler. J’essaie toujours de faire en sorte que le portrait de la pochette colle avec la musique, et là je pense que c’est le cas.
Tu as enregistré le disque très vite, en une petite semaine. C’est quelque chose d’habituel pour toi ?
En fait, j’ai passé plus de temps sur mes premiers disques, mais c’est parce que j’avais plus d’argent… (sourire). Là, les musiciens avec lesquels je voulais travailler n’étaient disponibles que cinq jours, il a donc fallu aller vite. On a enregistré quatre ou cinq morceaux par jour, alors qu’à mes débuts c’était plutôt deux. Tout s’est bien passé, et de manière générale je préfère travailler rapidement. Je n’écris pas en studio, j’arrive avec les chansons déjà prêtes, et il n’y a plus qu’à trouver ensemble les arrangements les plus appropriés, le son qui convient… Certains de mes albums ont quand même pris beaucoup plus de temps à faire, comme “Exit Strategy of the Soul” : j’ai passé près d’un an dessus et je n’ai pas trop aimé ça. J’écris en permanence, et le temps que le disque sorte, j’étais déjà passé à autre chose et mon intérêt s’était émoussé.
Quel est le rôle d’un producteur pour toi ?
Mitchell Froom et Tchad Blake, qui ont produit mes premiers albums, formaient vraiment un bon tandem. Mitchell peut être comparé à Gil Evans, qui a travaillé avec Miles Davis. Il adore les arrangements, sur chaque album on passait une semaine ou deux dessus. Moi je n’y connaissais pas grand-chose au début, lui me suggérait d’ajouter un pont ici, de changer de tonalité là, et ça m’a vraiment ouvert les yeux. Arrivé au troisième album, c’étaient des choses auxquelles je pensais moi-même, en amont. Tchad Blake, lui, ne s’intéressait même pas vraiment aux chansons ; son truc, c’était le son. Parfois, la façon dont il faisait sonner mes chansons me rendait presque nerveux ! Je ne lui disais pas, mais j’avais peur qu’il les dénature. Ceci dit, je pense que c’est un génie. Par exemple, pendant un enregistrement, une porte claquait, et lui, au lieu de supprimer le bruit, il tentait de l’inclure et de le rendre intéressant. C’était cool, mais en même temps ça voulait dire que je risquais de ne pas passer en radio, comme certains morceaux de Tom Waits (sourire). Ensuite j’ai voulu collaborer avec d’autres producteurs, comme cet Anglais, Martin Terefe, avec qui j’ai fait trois albums. J’aime beaucoup sa façon de travailler : il réussit à faire sonner de façon contemporaine des morceaux qui sont plutôt folk à la base. Il ajoute des éléments électroniques, par exemple. Chaque producteur apporte beaucoup, ne serait-ce que par sa maîtrise de la technique. Pour le dernier album, ceci dit, j’ai davantage assuré la production moi-même, car Jim Scott, qui étaient aux manettes, est plutôt un ingénieur du son. C’est sans doute le disque dans lequel j’étais le plus impliqué à ce niveau-là.
A tes débuts, tu étais sur une major, puis tes disques sont sortis sur des labels indépendants ou plus modestes, comme Cooking Vinyl pour le dernier. Vois-tu une différence dans leur approche de ta musique, et qu’est-ce qui te convient le mieux ?
Je trouve que Cooking Vinyl a fait du bon boulot. J’avais déjà sorti un disque chez eux en 2001, qui n’avait pas eu un énorme succès, puis j’étais allé sur d’autres labels où ce n’était pas tellement mieux. Je suis finalement retourné chez Cooking Vinyl pour “Long Player Late Bloomer” (2011), mon disque qui s’est le mieux vendu. J’étais heureux de constater qu’ils existaient encore, qu’ils étaient assez actifs, et que beaucoup de gens qui y travaillaient dix ans plus tôt y étaient toujours. C’est plutôt rare dans l’industrie musicale, les postes sont assez précaires et il y a beaucoup de turn-over… Donc je pense que ma musique est plutôt faite pour les petits labels. Interscope (qui a sorti ses premiers albums dans la deuxième moitié des années 90, ndlr) n’a jamais trop su quoi faire de moi.
Les bouleversements dans l’industrie musicale ces vingt dernières années ont-il eu un impact sur ta carrière ?
Oh oui… J’étais assez naïf quand j’étais sur Interscope. C’était une grosse maison de disques et je pensais que ce n’était pas très grave si je ne vendais pas beaucoup d’albums, parce que j’avais de bonnes critiques, tout ça… Mais au moment de mon troisième album, Interscope a fusionné avec Geffen et A&M, devenant vraiment énorme (c’est aujourd’hui une filiale d’Universal, ndlr). Ils avaient U2, Cher, Beck, et d’un coup je me suis retrouvé dans les tréfonds de leur catalogue, ils n’avaient plus beaucoup de temps à me consacrer. Mes disques coûtaient beaucoup d’argent à faire, et Interscope a décidé de ne pas sortir le quatrième, “Blueboy”. Ils m’ont laissé partir, et depuis j’ai été sur différents labels, avec des expériences plus ou moins heureuses selon les cas… C’est vrai que dans les années 90, tout le monde semblait gagner beaucoup d’argent avec la musique, sauf moi. J’avais l’impression d’avoir raté le coche. Faire de la musique reste pour moi une lutte permanente, car ça coûte cher d’enregistrer des disques, de tourner dans le monde entier avec un groupe, et je paie tout de ma poche. J’aurais aimé faire au moins un gros succès à un moment de ma carrière ; je crains que ce ne soit trop tard désormais.
Dans les années 90, après l’énorme succès de Nirvana ou R.E.M., les majors américaines ont signé beaucoup de groupes indépendants en pensant qu’ils allaient devenir énormes, mais souvent ça n’a pas été le cas…
Oui, elles signaient tout le monde à l’époque, pour beaucoup d’argent ! Un ami avait signé un contrat d’un million de dollars, et ensuite la maison de disques ne savait plus quoi faire de son album… Les majors rachetaient des petits labels sans avoir de véritable stratégie. Ce n’est pas étonnant que l’industrie de la musique soit dans un tel état aujourd’hui, elle est victime de sa propre avidité et de sa gabegie. Beaucoup d’argent a été jeté par les fenêtres. Je ne pourrai jamais rembourser Interscope, qui avec moi ne rentrera donc pas dans ses frais : on m’a forcé à faire des clips, j’avais un tour bus, tout un tas de dépenses qui m’étaient facturées. C’est une situation plutôt injuste.
L’album “Ron Sexsmith”, considéré comme ton premier véritable album solo, est paru il y a vingt ans. Aimerais-tu le ressortir pour l’occasion, peut-être dans une version augmentée ?
Oui, j’aimerais beaucoup, mais là aussi c’est frustrant car j’en avais parlé à mon manager il y a deux ans. Je voyais que tous les artistes sortaient des éditions anniversaires avec des morceaux bonus, ça me semblait donc une bonne idée. Et puis l’an dernier, j’ai eu cinquante ans, et je me suis dit que pour marquer le coup je pourrais sortir un best-of de cinquante titres sur deux CD, vingt-cinq sur chaque. Personne n’était intéressé, ni les labels, ni mon management. J’aurais au moins aimé ressortir mon premier album en vinyle car il n’existe pas dans ce format, mais là non plus, personne n’a bougé. Ça m’a beaucoup déçu. Mais j’espère au moins que tous mes albums seront réédités un jour.
Quand ce disque est sorti, tu avais déjà 31 ans. Un sonwgriter mature, donc…
J’étais déjà assez vieux, c’est vrai ! Le label avait mis un sticker sur le disque qui disait que j’avais 27 ans, sans me demander mon avis… (sourire) Bon, ça ne faisait pas une grande différence avec mon âge véritable, mais quand même. En fait, tous mes héros, que ce soit Randy Newman ou Bill Withers, Harry Nilsson, Leonard Cohen, ne se sont jamais forcés à écrire pour un public jeune. Je voulais faire le même genre de carrière, être reconnu comme un auteur de chansons avec de la substance. Ce qui ne signifiait pas pour autant que je ne voulais pas avoir de succès, de tubes, car je suis aussi fan des Beatles et de groupes qui étaient très populaires. Mais à l’époque où j’ai commencé, la musique que je faisais n’était pas à la mode. Ce qui marchait alors, c’était des groupes comme les Counting Crows, Hootie and the Blowfish… Je ne sonnais pas franchement comme eux, je n’avais pas ce genre de voix (il imite les chanteurs de ces formations par une espèce de grommellement). De ce point de vue, me retrouver sur Interscope était très étrange, entre Marilyn Manson, Eminem et Snoop Dogg. Je me demandais ce que je faisais là ! J’avais même posé la question au boss, Jimmy Iovine (producteur de disques à succès dans les années 70 et 80, il a depuis fondé l’entreprise Beats Electronic avec Dr. Dre, ndlr). « Pourquoi m’avez-vous signé ? » Il m’avais répondu qu’il aimait les songwriters, comme Tom Petty avec qui il avait travaillé… Mais les gens d’Interscope ne m’ont jamais montré beaucoup d’affection.
Tu parlais des Beatles ; Paul McCartney ne tarit pas d’éloges sur toi. Il a joué il y a quelques jours au Stade de France (l’interview a eu lieu en juin dernier, ndlr), et pas seulement ses morceaux les plus rock, malgré le gigantisme du lieu. Pourrais-tu t’imaginer jouer toi aussi tes chansons dans un stade ?
Paul McCartney a énormément de hits et il peut se permettre de jouer des ballades dans un stade. Moi, je n’en ai pas vraiment… L’endroit idéal pour ma musique, c’est le Royal Albert Hall à Londres. J’y ai joué il y a quelques années et c’était incroyable, je n’avais jamais rêvé de me produire dans un endroit comme ça. Si je pouvais ne passer que dans ce type de salles, je serais très heureux. J’aime les théâtres, ils ont du cachet, le son est bon, les coulisses agréables… Plus je vieillis, moins j’aime tourner car c’est fatigant, et les endroits ne sont pas toujours très reluisants, parfois il y a des graffitis de pénis sur les murs dans les loges… (sourire) Quand on se retrouve dans une belle salle, on a l’impression d’avoir franchi un nouveau palier. Mais bon, une fois qu’on est sur scène, on oublie un peu tout ça, l’important c’est de donner le meilleur concert possible.
Je crois que ta compagne (Colleen Hixenbaugh, également musicienne) est avec toi sur cette tournée ?
Tout à fait. Elle m’est d’une aide précieuse, elle tient notamment le stand de merchandising. Ça peut être agréable d’être juste avec les gars (ses musiciens, ndlr), mais je suis content de l’avoir à mes côtés. Elle s’assure que je ne bois pas trop, que je ne mange pas trop, toutes ces choses… (sourire) Oui, elle s’occupe bien de moi.
Tu sembles avoir plus de succès dans certains pays que dans d’autres. Où est-ce que ça marche le mieux pour toi ?
En fait, je peux aller jouer dans le monde entier, au Japon, en Australie… Il n’y a aucun endroit où je sois vraiment populaire, mais j’ai des fans un peu partout. Le marché le plus difficile pour moi, c’est les Etats-Unis. Je viens de tourner là-bas, et c’était un peu décourageant de voir que je n’attirais pas plus de monde après quatorze albums, même si l’accueil était toujours chaleureux. Il n’y a que dans les plus grandes villes que ça marche bien, New York, Chicago… Donc, les Etats-Unis, je pense que je vais abandonner, parce que ça fait trop longtemps que j’essaie, une vingtaine d’années, et je ne sais plus trop quoi faire… La Grande-Bretagne, c’est différent. J’avais un certain succès là-bas dans les années 90, puis plus tellement, et là c’est revenu. Mon album “Retriever” (2004) m’a aussi ouvert de nouveaux territoires où je n’étais pas trop connu jusque-là. Mais c’est assez variable : à une époque, ça marchait bien en Suède, plus tellement maintenant, en revanche j’ai un petit public en Espagne… Je vais là où les gens s’intéressent à moi. J’aimerais qu’un de mes disques ait un succès international, même modeste, mais ça ne dépend pas vraiment de moi.
L’Angleterre a toujours aimé les singer-songwriters comme toi, sans doute parce que le public comprend les textes, ce qui est évidemment moins le cas dans les pays non-anglophones.
Et ils sont attachés à la mélodie, aussi, alors que j’ai l’impression que l’Amérique lui a tourné le dos, préfère la musique de club, comme une grande partie du monde d’ailleurs. Et vraiment, je ne supporte pas ce son. Pourtant, j’aime bien la musique pour danser, le r’n’b, mais là, c’est vraiment « poum, poum, poum », avec des voix stridentes… Je ne comprends pas trop pourquoi ça plaît aux gens, mais c’est ce qui est populaire aujourd’hui.
Le premier morceau du nouvel album, “Sure as the Sky”, est très pop, et pourrait être considéré comme un hommage aux Beatles. Etait-ce ton intention ?
Non, pas vraiment. J’ai plutôt pensé plutôt à la version de “Turn! Turn! Turn!” (chanson écrite par Pete Seeger à la fin des années 50, dont les paroles proviennent essentiellement de L’Ecclésiste, ndlr) par Judy Collins. Elle l’a enregistrée peu avant les Byrds, et Roger McGuinn joue sur la sienne. C’est sans doute comme ça qu’il a découvert le chanson, d’ailleurs. J’ai essayé d’écrire une chanson folk dans ce style, mais une fois en studio je me suis dit qu’on pourrait la faire davantage à la façon des Byrds. Ou des Kinks, qui restent mon groupe préféré. Mais au départ c’est plutôt une chanson folk, et d’une certaine manière elle l’est restée. Elle ressemble aussi un peu à une chanson pour enfants, elle a un côté très simple. Les mélodies me viennent facilement. L’aspect un peu particulier de cette chanson, c’est le pont, dont les accords peuvent paraître étranges. Mais ce n’était pas voulu, et d’ailleurs personne ne l’a remarqué. J’en suis assez fier, car sans cela la chanson serait vraiment répétitive. Les paroles, c’est plus compliqué. Pour chaque album, je m’arrache les cheveux… Mais dans l’ensemble, celui-ci n’a pas été très compliqué à réaliser, notamment parce que les musiciens étaient vraiment très bons. On n’a dû faire qu’une ou deux prises par chanson, c’est un disque très spontané.
L’un de tes morceaux les plus connus, “Brandy Alexander”, a été coécrit avec ta compatriote Leslie Feist, et vous en avez chacun donné une version. Comment s’est faite la rencontre ?
De façon assez accidentelle, en fait. J’aime beaucoup sa musique, et ce doit être réciproque vu qu’elle avait repris mon morceau “Secret Heart” sur son album “Let It Die”. Nous étions à une soirée, je buvais un Brandy Alexander (cocktail à base de cognac et de crème de cacao, ndlr) et elle m’a demandé ce que c’était. Je lui ai raconté la fameuse histoire avec John Lennon et Harry Nilsson. Le lendemain, elle m’a envoyé des paroles par mail, et je me suis demandé pourquoi je n’avais pas pensé plus tôt à écrire une chanson là-dessus ! J’ai trouvé rapidement une mélodie. J’aimais bien l’idée qu’il y ait en quelque sorte une chanson de moi sur chacun de ses albums (sourire), et ça me ferait plaisir qu’on fasse de nouveau quelque chose ensemble. Plus récemment, j’ai écrit deux chansons pour l’album de Shelby Lynne, une chanteuse country américaine. Je collabore beaucoup à distance avec d’autres artistes, c’est plus simple pour moi que d’être dans la même pièce. On m’envoie des textes ou des musiques, et je travaille de mon côté, au calme, c’est un fonctionnement qui me convient très bien.
Que penses-tu de la “scène canadienne” apparue dans les années 2000, avec des groupes comme Arcade Fire ?
C’était excitant, tous ces groupes formant une sorte de communauté, Broken Social Scene, Stars, même si je ne pense pas que j’en faisais vraiment partie. Enfin, tous ces musiciens plus jeunes étaient très sympas avec moi ! Il y a même des ponts entre les générations car Kevin Drew, de Broken Social Scene, a produit le nouvel album d’Andy Kim, l’auteur du tube “Sugar Sugar” à la fin des années 60, qui est un ami à moi. L’album est vraiment bien et je suis content pour lui, même si j’avoue que je suis un peu jaloux…
Pourrais-tu t’imaginer écrire uniquement pour d’autres, sans interpréter toi-même tes chansons ?
Hum, je ne sais pas… J’aime quand même bien enregistrer des albums et jouer sur scène, même si je pourrais envisager d’arrêter les tournées. En fait, mes chansons ont été reprises par pas mal de gens, dont certains plus célèbres que moi comme Michael Bublé ou Rod Stewart, mais ça n’a jamais été des tubes. C’est sûr que j’aimerais écrire davantage pour d’autres artistes, surtout ceux qui ont du succès. J’ai un ami qui travaille pour ce groupe, One Direction, il a dû leur écrire dix-huit chansons… Moi, une seule me suffirait, je pense qu’après je serais tranquille, je n’aurais plus de problèmes d’argent ! Alors que j’en ai toujours à 51 ans… Je ne vois pas trop ce que je pourrais faire à part écrire : j’ai déjà une quinzaine de nouvelles chansons, et j’ai aussi commencé un roman.
Tu te lances donc dans la littérature ?
En fait, je n’avais pas prévu d’écrire un roman, mais il se trouve que j’ai une histoire à raconter, et que ça n’avait jamais été le cas jusqu’ici. Je suis allé voir un éditeur, je lui ai dit que je ne savais pas trop ce que ça pourrait donner, mais il m’a encouragé à écrire. J’en suis au chapitre 13. Je suis un grand amateur de Dickens, dont l’œuvre a inspiré beaucoup de mes chansons, comme “Strawberry Blonde”. Ray Bradbury ou Steinbeck m’ont aussi influencé. Donc, voilà, j’écris un roman, je ne sais pas ce que ça vaudra et ce sera sans doute le seul que je ferai, car je suis avant tout un auteur de chansons.
Bonus : Une version de “Everyday I Write the Book” d’Elvis Costello interprétée en acoustique par son auteur, Ron Sexsmith, Jesse Winchester, Neko Case et Sheryl Crow. Ron a joué le morceau au New Morning avec Steve Nieve, des Attractions, au piano.