Le disque tourne en boucle depuis quelques semaines déjà, pourtant nous avons encore du mal à mettre des mots sur l’émotion suscitée par sa découverte. « The Weight of Spring » fait en effet partie des grandes rencontres, de celles dont on ne ressort pas tout à fait indemne.
Ensemble norvégien très rare dirigé par le multi-instrumentiste Ola Fløttum, The White Birch s’est éclipsé pendant une dizaine d’années, dans le but d’offrir enfin une descendance à son précédent effort, le mémorable « Come Up For Air ». Un temps indispensable à la finalisation de cette nouvelle offrande, dont la mise en scène trahit un sens du détail assez éloquent. Ici, un violon vient épouser les contours d’un piano noyé dans la brume (« The Fall »). Là, une voix féminine souligne les mots bleus du maître de cérémonie (« The Weight of Spring », « Lantern »). Ailleurs, une assemblée de cordes cinématographiques unit ses forces pour mener à bon port une embarcation vulnérable (« The Hours »). Partout, une sensibilité à fleur de peau, une sobriété esthétique de chaque instant, un chant imprégné de tristesse mais incapable de la moindre sensiblerie.
On pourrait évoquer de lointaines correspondances avec Mark Hollis ou Dakota Suite, sommités reconnues d’une certaine épure instrumentale. Toute comparaison avec des artistes existant ou ayant existé serait pourtant vaine, tant le travail exposé ici porte la signature unique de son concepteur. Aucun rapprochement ne parviendrait à exprimer le choc ressenti à chaque nouvelle écoute de ce grand disque tout en retenue. On en viendrait presque à souhaiter que, cette année au moins, l’hiver se prolonge un peu plus que d’ordinaire. Nous pourrions ainsi continuer à plonger sans filet dans les eaux glacées de cet océan de spleen typiquement nordique.
Artisan discret, The White Birch peut désormais retourner à la clandestinité. Avec « The Weight of Spring », il a déjà pris rendez-vous avec l’éternité.