Thomas Belhom a un parcours qui ferait pâlir bien des musiciens, et c’est une fois de plus tangible à l’écoute de ce nouvel album. “Maritima”, qui succède à “Rocéphine”, a en effet une densité qui n’a rien de commun, de celle qui ne se forge qu’avec le temps et aussi le talent. On retrouve aisément un peu de tout dans cet album : des percussions déclinées à l’infini, une voix un peu voilée, des atmosphères qui évoquent autant la mer que des paysages écrasés de soleil. C’est d’une justesse entousiasmante, de celle qui ouvre le champ des possibles, comme sur “Carnaval Mou” qui se risque à une rythmique un peu trip-hop avec des touches latino sur un sujet pas facile (l’amour entre demi-frère et demi-soeur). Les titres dépourvus de mots sont légion (“Earthquake”, “Krayola”, “Manon”, le passionnant « Assada Massala ») rappellent que Thomas Belhom ne fait pas dans l’extravagance, la pudeur n’étant jamais très loin même si la richesse est là. Les émotions viennent donc en douceur (“Panthère dans les algues”, “Color”), évoquant plus volontiers les flots d’une mer calme plutôt que des vagues dangereuses (qui semblent poindre sur “Hungary” ou “South of Tucson”), laissant toute latitude pour écouter chaque mélodie, chaque instrument (de la trompette, des violons, une batterie superbement utilisée). A la croisée de Tindersticks, de Calexico et pourtant parfaite signature d’une plume unique et inspirée, “Maritima” ne manque ni de beauté ni de charme, ce qui le rend à chaque écoute un peu plus indispensable.