C’est peu de dire que le concert est attendu : la Rock School Barbey annonce le concert complet, une demi-surprise tant Timber Timbre a su se créer une identité forte, avec une musique à la fois exigeante et séduisante.
La première partie était dévolue à Tasseomancy, et je suis en première ligne pour assister à ça. Pour autant, je n’ai pas été pris dans le set des Canadiens (eux aussi). Démarré sur une base folk avec un jeune homme seul à la guitare, qui s’avèrera être le batteur, puisque dès le deuxième morceau arrivent 3 jeunes femmes, étrangement lookées (bon, la casquette avec le rond qui fait miroir, ahem). Mais le pire ne s’arrête pas là : à l’écoute, c’est assez indescriptible, un mélange entre du folk avec de la musique new age, pour un rendu assez pompeux et grandiloquent. Pas du tout mon truc donc, et une drôle de mise en bouche avant Timber Timbre.
Je ne bouge pas d’un centimètre, trop bien placé au second rang pour envisager me déplacer, même si la drôle d’aération sous la scène a congelé les favorisés des premières lignes. Dire que les quatre Canadiens ont réchauffé l’atmosphère serait peut-être mentir : Timber Timbre joue plus sur l’ombre et la lumière pour séduire, et cet art, le groupe le maîtrise à la perfection. L’heure et demie, voire plus, passée en sa compagnie a confirmé la ribambelle d’adjectifs que l’on accole à leur musique : c’était beau, habité, sombre et parfois lumineux à la fois.
Dans une belle forme, Taylor Kirk a su captiver son auditoire, se montrant même drôle à plus d’une reprise. Que ce soit seul sur un “Demon Host” qui prend toujours autant au coeur et aux tripes, ou accompagné de ses complices d’une exemplaire précision, il mène sa barque sans aucune fausse note. Le set n’est pas fait de bas et de hauts, il est d’une harmonie renversante, passant d’un état à l’autre en toute fluidité, que l’ambiance soit à une certaine moiteur (“Hot Dreams”, “Black Water”), à une tension qui coupe la respiration de la salle (“Magic Arrow”, “Curtains”) ou aux grands espaces (“Grand Canyon”). La justesse n’empêche pas l’émotion, elle la transcende car elle se double d’une sobriété qui rappelle que les chansons sont là pour être appréciées dans leur intégralité. L’avertissement à l’entrée sur l’interdiction de prendre des photos pendant le set a porté ses fruits visiblement : chacun a reçu cette leçon de beauté musicale dans le recueillement qu’elle mérite, sans jamais que celle-ci ne soit plombante. Un long rappel plus tard, Timber Timbre sort, laissant la salle chargée d’électricité et un peu rêveuse à la fois : le retour aux lumières n’est pas simple, le contrecoup d’une prestation captivante.