« Nous nous appelons Blouse, comme le vêtement ». C’est dans un souffle que Charlie Hilton introduit le groupe dans un français proche de la perfection. Une langue qu’elle utilisera à plusieurs reprises pour remercier chaleureusement le public clairsemé s’étant rassemblé à l’iBoat de Bordeaux ce soir-là.
Le magnétisme de la brunette opère dès les premières notes d’ »Imperium », le titre éponyme du deuxième album, que la bande venue de Portland défend lors de cette tournée européenne. Si la voix éthérée de Charlie, parée de tous ses effets, est le fil conducteur persistant sur les deux albums, le dernier-né opère une transition assez nette. Le trio, épaulé d’un deuxième guitariste pour le live, a laissé tomber synthés et batteries électroniques pour succomber aux sirènes du rock nineties en pleine recrudescence. L’atmosphère onirique de leur premier disque sous influence Radio Dept disparaît en partie pour faire la part belle à la six-cordes. Charlie va jusqu’à empoigner une guitare sèche pour un morceau, faisant sonner « 1000 years » comme une ballade signée Hole. Ce tournant, évident sur disque, se fond davantage dans la masse d’un live qui met l’accent sur le son des vrais instruments sans abuser des artifices synthétiques. La basse notamment, véritable pierre angulaire des langoureuses pépites de Blouse, est tenue par Patrick Adams, casquette « BOY » vissée sur la tête et tatouages graphiques sur les bras. Son sourire est rare, comme celui des deux autres acolytes (Arian Jalali à la guitare et aux synthés, Paul Roper à la batterie, plus avenant dans un haut ajouré assez douteux) ; mais la délicieuse Charlie, dont les jambes s’échappent de la chemise XXL pour caresser les pédales d’effets de sa guitare rose pâle, maintient heureusement le contact avec les spectateurs enthousiastes. Les titres extraits des deux albums se succèdent, à parts égales, sur fond d’équations colorées hautement psychédéliques : les arpèges cosmiques et ultra-efficaces qui donnent à « Into black » une allure de classique, mais aussi les riffs saturés des morceaux les plus récents ; la mélodie imparable d’ »Imperium » ; la sensualité de « They fly away » ou encore la déflagration sonique que les beats obsédants de « Time travel » nous assènent en guise de clôture. Blouse disparaît quelques minutes dans les loges pour revenir sous les acclamations et interpréter en bonus la vaporeuse « Fountain in rewind » qui résonne encore comme un écho embrumé dans nos têtes.