« Adieu Verdure », le titre, peut être lu au propre comme au figuré : après le succès de « Approche-toi » sur lequel le visage du chanteur était parsemé de gazon, Dick Annegarn tient à se séparer de l’image de hippie bucolique qui lui colle (pour le coup au sens propre) à la peau. Au figuré, on peut lire le titre comme la négation de l’expression « se mettre au vert » : fini la pause qui a duré près de vingt ans, le chanteur décide (provisoirement en tous cas) de revenir à la ville, de revenir se frotter au business musical qu’il a fui depuis belle lurette.
Et de fait, cet album sorti en 1999 est plus urbain, débutant par « Que toi », un beau Chicago blues en français et aux paroles heurtées. Du blues, il y en aura aussi plus loin sur « Keep Your Hands Off Her », reprise de Leadbelly ou, par petites touches, sur « Rosy ». « Boileau » apporte même un parfum funky (qui cache souvent, chez Annegarn, comme 25 ans auparavant sur « Nicotine Queen », des paroles plus incisives). Au rayon des nouveautés (pas forcément très urbaines), Annegarn invite Matthieu Boogaerts et son univers minimaliste sur « Rhapsode », le plus beau titre de l’album, sur lequel les deux voix, si dissemblables, font merveille.
Mais, soyons honnête, Dick Annegarn ne bouleverse pas entièrement son monde : cet album est probablement plus « adulte » mais certains titres comme « La Limonade » (avec son accompagnement à l’harmonium et sa candeur) sait ravir les fans de la première heure. D’autres morceaux, comme le très beau « Javer » ou la désormais classique chanson-ville (« Lille ») font remonter cette mélancolie chère à Dick Annegarn (d’ailleurs, à bien y réfléchir, avec le blues, on ne s’éloigne pas vraiment de la mélancolie). Et, de toute façon, sur la chanson titre, le chanteur donne lui-même la morale de cet album-parenthèse enchantée :
« Dis nature, pourrais-je revenir ?
Je fais mes bagages, j’en n’ai pas pour longtemps. »