En gravissant un à un les échelons qui l’ont conduit du statut de formation lo-fi respectée mais confidentielle jusqu’au rang de figure incontournable de l’indie-rock contemporain, Woods a posé les fondations d’une discographie dont la consistance commence à donner le tournis. Si « Bend Beyond » (2012) s’imposait déjà comme un bel accomplissement, que dire alors de son successeur ? Plus étoffé dans son instrumentation et confirmant une volonté de mettre de l’ordre dans univers autrefois brinquebalant, ce septième chapitre impeccablement produit réussi l’improbable exploit d’être encore meilleur.
Ballotté entre folk-rock champêtre (“New Light”, “Full Moon”) et optimisme pop (“Shining”, “Only the Lonely”), le groupe de Brooklyn manipule ici l’acoustique et l’électrique avec une aisance digne des plus nobles institutions nord-américaines. Moins bancale qu’elle a pu l’être par le passé, la musique de Woods sait aujourd’hui se faire plus raffinée et caressante (“Moving to the Left”, le dylanien “Leaves Like Glass”). Pourtant, comme en témoigne une surprenante piste expérimentale de plus de neuf minutes qui donne son titre à l’album, la bande ne s’est pas totalement dessaisie de ses envies de hors piste. Désormais de taille à canaliser sa fantaisie sans totalement la réprimer, elle s’est métamorphosée en une belle aventurière plus raisonnée que téméraire.
Ce très grand disque printanier et solidement charpenté, nul doute que Jeremy Earl et ses camarades le portaient en eux depuis longtemps déjà. Il leur fallait donc simplement continuer leur progression, pour acquérir enfin la maturité et la confiance indispensables à sa réalisation. Cette ascension patiente et déterminée vers les sommets donne un peu plus de valeur à un album parfait, qui devrait permettre à Woods d’élargir encore son audience.