L’espace, je n’en ai presque jamais rêvé. Certes, la vue d’en haut vaut très certainement le détour, mais l’idée de me retrouver à la dérive tel un George Clooney farceur, moyen pour moi. Mais ça ne fait pas partie des craintes de Florent Marchet, qui signe avec cet album un voyage des plus surprenants, mais dans lequel j’ai adoré dériver.
Non que l’univers décrit semble très accueillant, même loin de là. Les angoisses terrestres, les bassesses de l’humain trouvent le même terrain d’expression là-haut qu’ici-bas. Il n’y a guère de héros, mais l’immensité du paysage interstellaire agit comme un moteur pour le Français, qui nous trimballe de vaisseau spatial en territoires ouverts sur le vide, sans oublier la sphère la plus intime. Car c’est bien l’humain qui trône au milieu de ces histoires, dans toutes ses facettes. D’une vie de loser assumé (“Où étais-tu ?” : “Où étais-tu, quand j’étais à la rue, misant sur des dahus, des chevaux inconnus ?”) en course effrénée (“Héliopolis”, vrai tube pop rétro-futuriste, “Space Opera” et son sitar) à une histoire d’amour tout en chiffres (“647”), Florent Marchet se distingue, une fois de plus, par une façon de croquer avec une jouissive justesse des personnages et des décors qui n’appartiennent qu’à lui, grâce à des textes acérés. La famille embarquée dans “Apollo 21” semble incroyablement proche de nous, avec les angoisses d’un voyage sans retour, et nous renvoie à notre condition d’êtres humains, un peu perdus (“Devant l’espace”), qui ne veulent pas vivre seuls (“Reste avec moi”, “Où étais-tu ?”), qui peuplent ce disque étonnant. Etonnant, il l’est aussi par sa richesse, sa forme souvent mouvante (une grosse base de sons synthétiques, des touches d’une pop aux reflets funky avec une prédominance du chant), et par son inépuisable générosité. Avec “Ma particule élémentaire”, le Berrichon referme la boucle de ce voyage avec beaucoup de douceur, comme un atterrissage joliment maîtrisé. Le singulier Florent Marchet signe à nouveau un disque majeur, vaste comme une galaxie, et tout aussi émouvant que le Bambi de votre enfance.
Florent Marchet, Baptiste W. Hamon, le Rocher de Palmer (Cenon), 2 décembre 2022 – POPnews
[…] rappel, le temps de trois titres (pour l’unique évocation de la soirée de l’album “Bambi Galaxy” avec “Ma particule élémentaire”). Une nouvelle standing ovation plus que méritée fait […]