La discographie du prolifique Howe Gelb est déjà tellement fournie que l’on aurait plutôt tendance à ne rien attendre d’une nouvelle publication du bonhomme, près de trente ans après ses débuts. Pourtant, dès que s’ouvrent les portes du désert via l’introductif « Vortexas » (en collaboration avec Bonnie ‘Prince’ Billy), l’envie de suivre les pistes poussiéreuses de l’Arizona nous étreint à nouveau, comme aux plus belles heures de Giant Sand. Gelb n’a certes jamais commis de véritable faux-pas artistique, tout au plus quelques-uns de ses albums nous ont-ils paru un poil moins inspirés que d’autres.
Si celui-ci se classe instantanément dans la catégorie des incontournables, c’est d’abord parce que le songwriter a su réunir au chevet de ses nouvelles chansons un casting idéal (l’héritier M. Ward à la guitare, Steve Shelley à la batterie…). Avec cette équipe considérablement resserrée, nous sommes donc très loin des tentations expansionnistes de « Tuscon », l’opéra country-rock publié l’an passé par un Giant Sand augmenté en version xxl. Cette fois en formule réduite, Gelb s’autorise certes quelques fantaisies (le jazz déviant d' »Instigated Chimes », les chœurs aux accents de comédie musicale du malicieux « Unforgivable ») mais il s’appuie d’abord sur ses fondamentaux pour servir une nouvelle rasade de titres intimistes (« The Coincidentalist », « Looking That Way ») et typiquement décalés (« Left of the Center », qui organise le télescopage fantasmatique de Leonard Cohen et Ennio Morricone ou « The 3 Deaths of Lucky », duo feutré avec l’Ecossaise KT Tunstall). Avec un sens de la retenue particulièrement bienvenu, Howe Gelb vient de nous rappeler pourquoi sa musique est tellement précieuse à nos oreilles. Indispensable, une fois de plus.