Trouble est un membre de Duct Tape Entertainment, le collectif et label d’Atlanta fondé par un autre rappeur en vue d’aujourd’hui, Alley Boy. Et si une chose semble avoir marqué ce jeune homme de manière indélébile, c’est bien son séjour en prison. Sa précédente sortie, December 17th, une des mixtapes notables de 2011, avait en effet pour titre la date de sa remise en liberté, fin 2010. Et cette autre, 431 Days, finalisée un peu plus tard, en mars 2012, poursuit l’idée en comptant le nombre de jours qui ont séparé la fin de son incarcération de la mise en ligne de ce nouvel enregistrement gratuit.
Vu son passif, rien de surprenant si Trouble creuse le registre habituel du gangster et du bad boy, Le rappeur goûte à la liberté retrouvée (« Free »), mais n’en donne pas moins dans un rap noir, belliqueux, où l’on ne renie pas ses mauvais actes et où l’on représente son territoire (« ATL »), renforcé par une musique synthétique et enlevée. Il y a pourtant autre chose chez ce rappeur, une posture différente de celle des m’as-tu-vu et des tenants du trap rap local, dans ses dimensions les plus cartoonesques. Avec des titres comme ce remarquable « U Don’t Deserve Dat » qui invite les victimes à ne plus subir, Trouble cultive ce côté réfléchi, raisonnable, cette sagesse de la rue, ces leçons de vie professées par un délinquant aguerri, dont certains déplorent la disparition dans le rap d’aujourd’hui.
Si 431 Days reste une mixtape, nécessairement trop longue et éclectique, elle n’en est pas moins riche en titres marquants. Seules la boucle lassante de « Let Them Tell It » et l’horrible bluette R&B de « Would You? », interprétée avec Verse Simmonds et produite par DJ Toomp, gâchent le tableau. Pour le reste, c’est rempli de petits hymnes bien sentis comme YUUURD!, le virevoltant « GO! » et le lourd « Characters », de passages tire-larmes réussis, comme cet « All I’m Worried About » où Trouble célèbre ses proches, et de duos percutants avec d’autres gens de Duct Tape ou avec des artistes confirmés, Gucci Mane sur « Hustle & Ambition », et Bun B sur un excellentissime « Never Understand ». Sans oublier, cerise sur le gâteau, un gargantuesque « Fuck Shit Crew », long posse cut de 7 minutes avec 9 rappeurs, particulièrement efficace avec ses cloches et son refrain dévastateur, une fin parfaite pour cette autre mixtape sortie par un Trouble libéré, au propre comme au figuré.