Une éclipse longue d’une bonne décennie, et l’on retrouve les Beachwood Sparks totalement identiques à ce qu’ils étaient lorsque l’on s’est quittés. La formation, adepte d’une alt-country planante et supérieurement mélodique, ravive une fois de plus une certaine idée de la douceur de vivre californienne. Bande-son idéale d’une virée fantasmée le long des côtes du Pacifique, ce troisième opus parfaitement servi par la production moelleuse de Thom Monahan (Scud Mountain Boys, Pernice Brothers, Vetiver…) signe le retour bienvenu d’un groupe qui fait rétrospectivement figure de pionnier du récent renouveau pop-folk nord-américain. On imagine ainsi très bien Brent Rademaker et sa bande habités, au moment de remettre la main à la pâte, par le désir légitime de profiter au moins un petit peu du succès colossal des Fleet Foxes ou autres Grizzly Bear. Ces artistes aujourd’hui incontournables sont en effet les héritiers évidents de cette musique purement laidback, comme bloquée dans une faille spatio-temporelle située vers la fin des années 60 et le début des années 70. Les compositions de Beachwood Sparks fascinent en effet par leur refus obstiné de toute forme de modernité. Ici, on s’entête vraisemblablement à croire que le punk, le rap, l’électro ou toute autre forme de nouveauté musicale n’ont jamais existé ou alors loin, très loin de Los Angeles. Un peu comme chez Jonathan Wilson, les idoles du moment s’appellent toujours The Flying Burrito Brothers, Buffalo Springfield, The Byrds ou Crobsy, Stills, Nash & Young. Nulle trace d’innovation donc chez nos cinq camarades (ici épaulés, entre autres, par Neal Casal), visiblement plus enclins à perpétuer sereinement une précieuse tradition qu’à jouer aux aventuriers en herbe. Cette sagesse relative pourrait faire de Beachwood Sparks l’égal des Anglais délicats de Mojave 3 mais en plus avachis, en plus paresseux aussi. Sans doute la faute en revient-elle à ce fameux soleil californien auquel nos amis, trop occupés à fixer un ciel immense, se sont sans doute trop exposés. Lumineux et fabuleusement harmonieux de bout en bout, « The Tarnished Gold » voit le groupe ajouter quelques jolis classiques en puissance (au choix, « Sparks Fly Again », « Mollusk » ou « The Orange Grass Special ») à un répertoire qui entretient avec passion le souvenir de ce que l’immense Gram Parsons qualifia un jour de cosmic american music. On est prêt à accorder un nouveau congé à rallonge à ces talentueux gardiens du temple, pour peu qu’ils daignent nous revenir un jour munis de pareils trésors.