En 2005, Emanuel Lundgren décide de mettre en forme les chansons qu’il avait depuis quelques années dans la tête. Des chansons pop acidulées naïves qui avaient besoin d’une ambiance festive pour voir le jour. Alors, au lieu de les enregistrer simplement avec Valley Days, son groupe de l’époque, Lundgren décide d’appeler tous ses amis (musiciens ou pas) et de les convier à une bringue musicale géante histoire d’en finir avec ces chansons. Vingt huit de ces amis répondent présent à l’appel et se retrouvent pendant un mois dans un studio. Les potes du désormais chef d’orchestre Emanuel Lundgren attrapent les instruments qui leur tombent sous la main, participent aux choeurs abondants que ce dernier avait imaginés ou tapent dans leurs mains et se lancent dans une aventure qui va durer un peu plus longtemps que ce premier mois de vacances qu’il avaient pris ensemble pour enregistrer les chansons de l’épouvantail moustachu de Jönköping. Ce qu’il ne savent en effet pas, c’est que le premier single (« Sing!! ») puis le premier album (« Let me Introduce My Friends ») du groupe, dorénavant connu sous le nom de I’m From Barcelona, deviendront immédiatement des hits en Suède puis dans une bonne partie de l’Europe. La joyeuse troupe loue donc un bus et part sur les routes à la rencontre du public qu’ils avaient conquis.
Sept ans et deux albums plus tard, les vacances de la petite trentaine de potes du Småland sont toujours conditionnées par des enregistrements ou par une tournée de ce groupe de doux dingues. Lundgren leur avait initialement demandé un mois. Ils sont avec lui depuis sept ans. Mais quand quinze de ces potes arrivent sur la scène de La Gare de Coustellet avec Emanuel Lundgren ce jeudi 29 mars, on saisit tout de suite qu’il a dû s’agir de sept ans de plaisir et que, comme ces Suédois là sont généreux, il est hors de question qu’ils gardent leur joie pour eux.
C’est donc dans une douce euphorie qu’ils entament leur set. Un « Get in Line » joué sur les chapeaux de roue et sur lequel on commence immédiatement à bouger dans la salle. Puis après avoir demandé si, par hasard, quelqu’un dans le public s’appellerait « Charlie Parker » (ce à quoi une dizaine de personnes répond oui), ils enchaînent la dite chanson avec « Always Spring » (la saison préférée des rouquins selon Lundgren), et on commence à avoir sérieusement chaud.
Le truc, c’est qu’il n’est pas question pour eux, comme l’annonce dés le début le chanteur ébouriffé, de faire un concert pour nous, mais plutôt un concert avec nous. Du coup, ça chante dans la salle et sur la scène. Sur Battleships, Lundgren invite même deux jeunes gens (un gars et une fille qui ont l’air ravi) à venir chanter avec lui. Moi qui ai d’habitude horreur de ça : je me déplace en général pour voir un groupe jouer, par pour entendre des groupies chanter… Là, je me retrouve avec un sourire irrépressible à chantonner moi aussi le répétitif « I just wanted to see you my honey »… Et je crois que j’aime ça !
Il faut dire que l’énergie euphorique qui se dégage des seize chanteurs musiciens est hyper communicative. Je me surprends même à renvoyer des confettis géants, ou à faire passer des ballons gonflables qu’ils balancent abondamment dans la salle (n’importe quoi !). La musique de I’m From Barcelona qui peu paraître assez rudimentaire (3 ou 4 accords de guitare par chanson) se nourrit, elle aussi, de cette énergie et de cette envie de partage franche et exubérante. Mais s’il n’y avait que ça, on s’ennuierait sans doute assez vite. Heureusement, les mélodies composée par Emanuel Lundgren sont diablement efficaces, et les arrangements à la trompette, au saxophone et aux claviers et la rythmique sont beaucoup moins simplistes qu’il n’y paraît. On ne voit donc pas passer la vingtaine de chansons qu’ils ont chantée ce soir là : un florilège des trois albums du groupe, et un inédit intitulé « Crook ». Autant de titres qui, en live, deviennent inévitablement des tubes.
Quand ils quittent finalement la scène, apparemment épuisés par leur prestation (et on le serait à moins), on se dit qu’ils ne nous avaient pas menti au début : il s’agissait bien d’un concert avec nous et pas seulement pour nous. On est nous aussi un peu fatigués, et la salle entière ressemble aux rues de la capitale catalane après une victoire du Barça en Champions League. Et pourtant, on avait été prévenus dés le début : « We’ve got shooting stars, fireworks and neon lights… We’ve got everything you ever wanted here tonight » chantaient-ils dès le début de ce concert ! Un concert qui avait tout d’une explosion de bonheur.
Merci à toute l’équipe de la Gare (et en particulier à Sofi) de nous avoir offert ce pur moment de joie !