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Concerts

Paul McCartney, Ahoy (Rotterdam) le 24/03/2012

Aller voir McCartney en concert, voilà une idée qui ne m’était pour tout dire pas venue à l’idée avant. Sans doute la perspective du stadium blindé reprenant « Hey Jude » en chœur ne m’enchantait pas, mais c’est plutôt la taille du mythe McCartney qui impressionne – ça et le prix de la place… Mais en plus du mythe, Paulo vous sert trois heures de pur régal pour les oreilles.

Quand Paul apparaît, sobrement – costume strict, en même temps que son groupe – sur la scène de l’Ahoy, près de Rotterdam, difficile de ne pas penser avec émotion à ce que le bonhomme a traversé, à ce qu’il représente, à son influence prégnante. Pendant trois heures, McCartney jouera de cette émotion, forcément assez nostalgique, tout en offrant un panel très complet de son répertoire aussi plus récent, et de son énergie.

« Hello Goodbye » démarre en trombe. Le son est impeccablement beatlesien, un peu épaissi pour la scène. Gros gros frissons. Ça enchaîne sec. « All My Loving », le slow le plus rapide du monde, provoque du good vibe hyper palpable dans la salle – le public, assez familial, a des pointes autour de 55-70 ans, et une autre vers 15 ans. Sûr de son fait, McCartney déroule efficacement 55 ans de carrière avec un mélange de professionnalisme et de décontraction impressionnant.

On se rend bien compte que Macca aimerait réhabiliter son répertoire solo et surtout Wings. Ça réagit bien sur « Band on the Run » et « 1985 », très efficaces, même si le carton n’est pas celui des titres des Fab Four. Pour le reste, entre deux blagues potaches (rires garantis, même sur les blagues moyennes), les apartés du bonhomme participent beaucoup d’une nostalgie estampillée sixties. Les anecdotes croustillantes marchent du tonnerre – ce Ministre de la Défense russe, fan des Beatles, qui apprenait l’anglais par leurs disques, et qui, pour dire bonjour, disait « Hello Goodbye ! »

Sur le gros riff de « Foxy Lady », il y va de son petit solo de gratte (pas mal du tout), avant de rappeler qu’Hendrix reprit « Sgt Pepper » (le titre) en concert deux jours seulement après la sortie de « Sgt Pepper » (l’album). Ah oui, c’est vrai, c’est Paul McCartney, là, ce type a connu de près tous les musiciens qui ont compté ces soixante dernières années, plus quelques représentants du gratin politico-médiatique mondial en pleine guerre froide. Pour le reste Paulo a prévu quelques phrases en néerlandais – sûrement profondes vu la ferveur des réactions, mais je me demande s’il n’y avait pas quelques a priori positifs dans le public. Bref, tout cela est très bon enfant, et, si cela n’était pas fait par la moitié de la planète depuis plusieurs décennies il faudrait ici louer ce sens du plaisir et du partage manifesté en permanence par McCartney. Certes, à 70 ans, son jeu de scène est plus statique que sur les archives visibles un peu partout, mais la fraîcheur de la voix, intacte, et celle des compos, intemporelle, apportent au concert une énergie de tous les instants.

Le show est rodé  mais la légèreté du dispositif permet un peu de marge d’impro. (On aura même droit à un court « Yellow Submarine » réclamé par un spectateur). Les deux guitaristes, vieux beaux aux dents très blanches (Brian Ray et un autre) assurent, avec une petite tendance guitar heroes bien sentie, jamais poussive. Quant au batteur, Abe Laboriel Jr, costaud à la bouille expressive, il régale le public de ses mimiques hilarantes. Le concert est organisé par phases autour des différents instruments joués par Paulo – basse (Höfner of course), guitare électrique, piano, guitare acoustique, ukulele.

Citons, un peu en vrac (que voulez-vous, l’émotion me troubla), « Eleanor Rigby », beau comme un camion, « Let It Be » et « The Long and Winding Road » au piano, « Blackbird » seul à la guitare, « I Will », « A Day in the Life », « Paperback Writer », « Drive My Car », fougueux, mais moins que « Back in the USSR » – la palme de l’explosion revient pourtant à « Live and Let Die », accompagné d’un (vrai) feu d’artifice sur les refrains qui coupe le sifflet à nos amis bataves. Avec un répertoire pareil, impossible d’éviter les séquences émotions. Le groupe n’esquive pas : « Something » est dédié à George, avec photos d’archives en fond de salle ; démarré au ukulele, le titre prendra de l’ampleur avec l’arrivée des instruments. Superbe. 

Quant à John, c’est « Here Today » qui lui fait office d’hommage officiel – titre explicite s’il en est, un peu trop déclaratif, mais le moment, sur fond de pleine lune géante en fond de scène, est touchant. Plus ancré dans l’actu, « Sing the Changes » (de « The Fireman« )  est un beau message peace and love, sur fond d’Obama ; quelques titres plus tard on se retrouve carrément les doigts en V à reprendre en choeur « Give Peace a Chance », sans même avoir l’impression d’être ridicules… 

Alors, devant autant de ferveur, on se pliera à « Hey Jude » de bon c(h)oeur – ce sera le dernier titre avant les rappels – huit titres des Beatles, dont un explosif « Helter Skelter » (c’est un pléonasme), « Get Back » (we will) ou encore « All You Need Is Love » (ce fut vrai le temps d’un soir).

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