Le groupe venu de Montréal ne fait pas dans la dentelle, et pose son animalité comme point de départ de ce disque, dont le côté « mettons nos tripes sur la table » en fait une oeuvre terriblement addictive et littéralement viscérale.
L’entrée en matière est particulièrement puissante, avec un « Antepoc » complètement survolté, dont la section rythmique impressionne par sa puissance, sa constance. Elle est le parfait soutien de la voix de Annie-Claude Deschênes, qui incarne à la perfection le côté instable et menaçant du groupe : elle crie, elle feule, semble se convulser tellement elle transmet d’énergie et de folie dans son chant. Mais le groupe n’en perd pas pour autant le Nord : l’ensemble brasse du punk, du noise, un peu de cold wave voire de l’indus avec une facilité qui fait que le disque ne connaît presque aucun temps mort. L’énorme « Narcisse » avec sa ligne de basse étouffante et ses explosions hurlées succède à un « Mayakovsky » énervé à souhait, quand « S.O.H » ou « Gainsbourg » (aucun rapport avec l’homme à tête de chou) creusent un sillon plus doucereux et tout ausi addictif. Plus monolithiques, « Time to Reiterate », « Main District » ou « L’ordre des secteurs » et son clavier épileptique ne font pas de détail, et emportent tout sur leur passage. Mais il serait réducteur de faire de Duchess Says un groupe de bourrins : les subtilités sont suffisamment nombreuses pour que l’auditeur tende l’oreille et au besoin se laisse happer par la transe qui semble habiter ces morceaux, de la plus sauvage à la plus calme (sur « Yellow Pillow »). Totalement à part de ce que l’on entend traditionnellement du Québec, ce quatuor a quelque chose de suffisamment captivant pour mériter toute votre attention.