Le nouvel album de Megafaun, groupe aussi allumé et expérimental sur disque que généreux et simple sur scène, pourrait lui valoir une reconnaissance un peu plus large. Non pas que les plaisirs de la manipulation des sons aient disparu de son répertoire (à preuve, « These Words », le deuxième morceau, faisant glisser ses harmonies vocales sur une cascade de percussions concassées, ou, plus loin, le cosmic-show de « Serene Return »), mais l’album est plus calibré que d’ordinaire, et repose sur une variété équilibrée de perspectives, alternant up et mid-tempo, dans un savant mélange de clarté mélodique et de détails de production savoureux. On y retrouve encore ces instrumentaux improbables qui font l’originalité et l’humour du groupe (« Isadora », brass-folk bucolique), ces instantanés de sunshine-pop (« Second Friend »), ces ballades gracieuses (« Kill the Horns », « You Are the Light », « Everything » ), les sonorités folk seventies qui font le pont entre CSN&Y et l’americana d’aujourd’hui (« Second Friend », « Scorned »), et parfois même un bon tunnel de guitares shoegazouillantes (« These Words »), le tout apparemment composé et produit dans un surrégime de bonne humeur qui les ferait passer pour des inconséquents notoires en ces heures de crise financière et de variations sur la fin du monde. C’est aussi pour cela qu’on les aime, ces barbus débonnaires, pour leur capacité à nous happer dans la bulle protectrice de leur musique, à extraire du temps ces capsules sonores qui fusionnent toutes les époques, pour l’euphorie douce de cette aventure partageuse.
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