S. CAREY – All We Grow
(Jagjaguwar / Differ-Ant) [site] – acheter ce disque
Sean Carey est le batteur live de Bon Iver. N’en tirez toutefois aucune conclusion hâtive sur son travail en solo. Nous sommes loin de la folk un peu austère de « For Emma, Forever Ago ». « All We Grow » pourrait être décrit sommairement comme un disque de pop intimiste. Sommairement… Car la richesse mélodique n’a d’égale que la complexité de sa composition. Construits (littéralement) par couches, les neuf morceaux de « All We Grow » nécessitent une écoute attentive (idéalement au casque) pour en savourer toute la beauté.
Ce qui surprend tout d’abord sur ce premier album, c’est la discrétion de la batterie. Celle-ci disparaît la plupart du temps au profit de la voix, la guitare ou bien du piano pour ne reprendre le devant de la scène que lorsqu’elle apporte une réelle dimension mélodique, comme sur le bien nommé « Action ». Ceci s’explique simplement lorsqu’on sait que Sean a un diplôme universitaire de percussion classique… Dès lors, on comprend que le rythme a été envisagé de manière globale, comme une composante à part entière du travail de création. La base rythmique est d’ailleurs le plus souvent portée par le piano ou les boucles synthétiques, comme sur le magnifique « We Fell ». Cela confère à l’ensemble de l’album une délicatesse inouïe.
Une délicatesse et une homogénéité aussi. La majeure partie de ce premier opus, bien que provenant d’assemblage de boucles et d’expérimentations sonores, a été enregistrée en deux semaines. On en retire l’impression d’une construction presque classique, comme si chaque titre était le mouvement d’une oeuvre plus globale (un peu comme sur le « The B-suite » de Krazy Baldhead). « All We Grow » nécessite donc une écoute sur la longueur pour en apprécier tous les détails, les tours et les détours, mais aussi la composition dans son ensemble.
Tout cela pourrait cependant lasser si Carey ne possédait, au-delà de l’expérimentation musicale, un réel talent de songwriter. Nous avions découvert quelque temps avant la sortie de l’album le single « In The Dirt » : ce morceau à lui-seul est en mesure de rivaliser avec les plus belles compositions de Sigur Rós ou de Thom Yorke. « All We Grow » est d’ailleurs pour moi l’album que Yorke n’a pas réussi à faire en solo : un petit bijou mélodique, à la fois exigeant et abordable, riche et minimal, précieux et totalement indispensable !
BeB
Move
We Fell
In the Dirt
Rothko Fields
Mothers
Action
In the Stream
All We Grow
Broken