PATRICK WATSON – Just Another Ordinary Day
(Secret City Records) [site] – acheter ce disque
Je me souviens encore de Patrick Watson et son groupe qui, durant l’interview qu’il m’avait accordée, plaisantait sur les prix indécents auxquels s’échangeait « Just Another Ordinary Day », premier album propulsé au rang de culte (OK, j’exagère sans doute un peu…) parce que point de départ d’une belle discographie. Le voilà en bonne et due forme donc, malgré une sortie en catimini (forcément, l’attrait de la nouveauté n’est pas là).
Comment aborder ce disque d’ailleurs ? Autant faire la chose la plus naturelle qui soit, c’est à dire réinscrire le disque dans sa temporalité actuelle, et force est de constater que « Just Another Ordinary Day » portait, pardon, porte en lui toutes les marques de ce qu’allait devenir Patrick Watson & the Wooden Arms. L’absence au générique des musiciens n’est pas une réelle surprise, tant on sent que le disque est avant tout l’oeuvre du fantasque Québécois. Alors oui, il y a un peu moins de luxuriance, moins de sublimes envolées de batterie de Robbie Krueger, et la barque est surtout tenue par Patrick et Simon Angell, que l’on sent déjà important. Un tout petit peu plus aride que ses successeurs, le disque n’en dégage pas moins une réelle beauté, une forme plus sobre, dans les arrangements mais aussi la production, qui fait ressortir ces grandes plages atmosphériques, ces mélodies qui tiennent sur un fil et s’évaporent juste après, ces ambiances où l’on pourrait s’imaginer dans un grand désert blanc. Le piano est le guide, la voix de Patrick en est un autre, même si elle est un peu moins en avant que les autres disques : elle se cache à moitié dans « Woods », swingue sur le jazzy « Mary », et parfois disparaît dans des échos qui la rendent fantomatique. On est vraiment proche par moments de ce qu’a pu faire The Cinematic Orchestra, groupe auquel contribue Patrick Watson, sur l’inaugural « Just Another Ordinary Day », « Brigittes Theme » ou sur « Silent City », où il est si bon de se laisser porter par la légèreté des instruments, les mélodies éthérées, l’ampleur des silences. Le Québécois révèle aussi son côté Double-Face, avec un aspect presque cartoonesque sur « Gealman », et un autre beaucoup plus mélancolique sur « Shame », « Fall » ou « Sunday ». Patrick Watson n’est pas désormais un musicien complètement différent de celui qu’il était pour ce « Just Another Ordinary Day », et je retrouve sur celui-ci tout ce qui fait du Canadien l’un de mes songwriters favoris : une exubérance, une recherche de l’innovation et un mélange des genres toujours pertinents, jamais vains.
Mickaël Choisi
A lire également, sur Patrick Watson :
l’interview (2010)
la chronique de « Wooden Arms » (2009)
la chronique de « Close to Paradise » (2007)
Just Another Ordinary Day
Woods
Mary
Silent City
Shame
Brigittes Theme
Gealman
Fall
Sunday