BBMIX – Edition 2010 : Bobby Conn, Bonaparte, Raincoats, Swans, The Radio Dept., The Warlocks…
Chaque mois de novembre, pendant trois jours, le festival BBmix fait de Boulogne-Billancourt (92) une ville rock. Mais à sa manière, sans frime, avec une générosité et un sens de l’accueil qu’on ne trouve pas toujours de l’autre côté du périph. Cette année encore, l’agréable salle du Carré Belle-Feuille accueillait aussi bien des artistes rares et cultes (Bobby Conn, The Warlocks, The Raincoats, Swans) que des nouveaux venus prometteurs (Bonaparte, Young Michelin…). Copieux compte rendu de ces réjouissances boulonnaises.
Vendredi 26 novembre
Pensant plus raisonnable de se dispenser du concert de Too Young To Die, formation locale d’inspiration ska-fusion, on arrive juste à l’heure pour celui du semi-légendaire Bobby Conn. Agé de 43 ans, l’Américain avait fait un peu parler de lui il y a une petite dizaine d’années avec l’album « The Golden Age » sorti chez Thrill Jockey, mais son glam-punk-funk expérimental reste largement inconnu en France.
Visuellement, lui et ses quatre musiciens font forte impression : tous sont en treillis customisés (même la violoniste) et Conn, maquillé, affiche une allure de tapin tapé suprêmement rock’n’roll, quelque part entre le David Johansen de la grande époque et Amanda Lear. Musicalement, c’est un peu pareil, les chansons à rallonge partent joyeusement dans tous les sens, mais avec suffisamment d’accroches mélodiques et de surprises pour que l’attention ne faiblisse pas. Il y en a même quelques-uns qui dansent, bien qu’il soit encore relativement tôt dans la soirée. Pas le concert du siècle, certes, mais un peu plus qu’une simple curiosité.
Ce set de Bobby Conn constituait en tout cas une excellente préparation physique au délire qui nous attendait ensuite, offert par les Berlinois de Bonaparte. Une vaste troupe de musiciens et performers menée par le Suisse Tobias Jundt, qui glisse parfois quelques mots de français dans ses textes chantés en anglais (ils ont même un morceau intitulé « L’Etat c’est moi » !). La musique, une sorte d’électro-punk grinçant rappelant par moments PIL ou The Fall, est plutôt efficace, mais elle n’est qu’un élément parmi d’autres d’un live show débridé et provocant. Se succèdent ainsi sur scène des personnages aux accoutrements étranges, différents pour chaque chanson (et parfois quasiment nus), qui composent des allégories souvent obscures, parfois explicites (des femmes avec des écrans d’ordinateur à la place de la tête pour « Computer in Love »). Certes, sur une heure, on finit par frôler l’overdose de n’importe quoi, mais cette version extrême du cabaret berlinois reste l’une des choses les plus hallucinantes qu’on ait vues dans un festival rock.
Les Warlocks, eux, sont plus hallucinés qu’hallucinants, héritiers californiens à guitares (trois, il me semble, sans compter la basse) des Spacemen 3 et cousins de Black Rebel Motorcycle Club. J’en étais resté à leur album Phoenix sorti il y a sept ans, mais un ami m’a dit que ce n’était pas très grave car les suivants sonnaient à peu près pareil, malgré de nombreux changements de line-up (de toute façon, c’est toujours Bobby Hecksher qui commande).
Le groupe joue d’ailleurs deux extraits de ce disque, « Shake the Dope Out » et « Baby Blue », qui restent parmi les meilleurs moments du concert. Le reste n’est pas déplaisant, la puissance sonore impressionne, mais on cherche quand même en vain une chanson un peu plus originale que les autres qui viendrait rendre tout cela vraiment mémorable.