AS THE STARS FALL – Tempus Fugit
(Bothsides / Believe) [site]
Il est des parcours qui semblent bien surprenants, et dont l’aboutissement, ou au moins les étapes, viennent à faire découvrir une autre facette du travail d’un artiste. As the Stars Fall résulte de ces à-côtés, de ces chemins imprévus, qui se révèlent parfois brillants et passionnants. Derrière ces étoiles qui chutent, on trouve trois français, Steve, Guillaume et Remi, qui ont fait leurs armes dans le hip-hop en tant que producteurs. Projet plus global qu’un simple disque, "Tempus Fugit" établit des ponts avec la photographie, puisqu’une exposition en rapport avec le disque se tient à Paris durant le mois de mai, mais aussi avec le cinéma.
L’écoute du disque vient rapidement confirmer l’approche assez visuelle de la musique du trio. Par de très savants dosages, As the Stars Fall est parvenu à écrire une musique d’une force d’évocation immense, qui laisse l’auditeur prendre place dans des titres qui savent diffuser leur beauté insidieusement. Pour autant, le groupe ne perd jamais le fil, ne dilue jamais ses chansons dans de grands passages méditatifs froids : chaque note, chaque inflexion des morceaux viennent modifier, embellir ou allourdir l’ambiance qui règne et servent ainsi à tenir l’auditeur sous tension. As the Stars Fall construit ainsi le disque par une succession de nuances, dont les différences sont parfois infimes mais dont l’évidence saute à chaque fois aux oreilles. "Tempus Fugit" s’apprécie longtemps, parce qu’il est exigeant, mais aussi très rapidement grâce à la beauté des mélodies, leurs subtilités ou brutales variations qui tiennent en haleine et coupent le souffle en même temps. Pour guider l’auditeur dans la découverte de son univers, le groupe n’hésite pas à glisser des indices autres que musicaux, au travers de dialogues de films dont on sent qu’ils ont été choisis soigneusement, et que je me suis pris à décortiquer et anticiper au fur et à mesure de mes écoutes. Durant celles-ci, on croise les fantômes d’EZ3kiel, de DJ Shadow de la grande époque, de Godspeed You! Black Emperor : c’est martial ("Some Tears Can Never Dry"), aérien ("No Good Deed Goes Unpunished", "Frozen River", "The Road") ou tendu ("I Gave You a Choice", "Alone"), voire même schizophrène sur "Revolt" et ses montagnes russes, entre un début ambiant et un final tonitruant. Je pourrais tous les décortiquer, vous dire que le piano égrenne une forme de poésie très présente, quand les guitares viennent souvent apporter tension et les percussions distillent une forme de tristesse… Mais à la fin, que reste t-il de ces 10 morceaux, si ce n’est le sentiment d’avoir entendu un disque plein, dont la beauté n’est jamais ternie ? "Tempus Fugit" brille, toujours dans le noir et blanc que semble apprécier le trio : entre ces deux couleurs extrêmes, une infinité de nuances qui conduisent à un même résultat, 10 plages de musique à écouter, explorer, avant d’en ressortir bouleversé.
Mickaël Choisi
From Another Time
No Good Deed Goes Unpunished
Dead Leaf Dance
Some Tears Can Never Dry
Frozen River
The Road
I Gave You a Choice
Revolt
Alone
Untitled