LONELY DRIFTER KAREN – Fall Of Spring
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Ah… y a pas de doute, ils se sont trouvés ces trois-là ! Prenez une Autrichienne amatrice, autre autres, de cabaret allemand ; un pianiste espagnol, et un percussionniste italien – que tout sépare donc, la distance, à tout le moins ! – génialement inventifs ; mettez le tout dans un chaudron magique avec un peu de poudre de perlimpinpin par-dessus, et vous obtenez, l’improbable LDK, combo en marge de tout, complètement anachronique, mais terriblement à propos dans ce monde asphyxié, qui a besoin de petites bulles d’air telles que celles-là, auxquelles se raccrocher, pour survivre.
Si "Grass Is Singing" m’avait regonflé à coups de baguette magique et de poussière d’étoiles, le nouvel itinéraire emprunté, fort des atouts du passé, se permet en sus une incursion toute personnelle – ma foi brillamment assurée – dans les voies impénétrables de la sensualité : effet Melody Gardot et trémolos ? Peut-être… Peu importe, ça marche, et pourtant, même si ça rime, réussir à concilier glamour et humour n’est pas une mince affaire. Bien sûr, l’onirisme tient toujours une bonne part du marché – et c’est bien comme ça : on surprend toujours la chouette en pleine conversation avec un loup qui se gargarise allègrement sous les effets de la lune ; l’album est traversé de part en part par une route sillonnée, parcourue d’embûches (entendez cassures rythmiques et autres échappées sonores) sympathiques, qui conduit à des micro-contes qui se dévoilent dans des décors en carton, mais le trio – et particulièrement Tanja – séducteur à souhait, sécrète une nouvelle fragrance hypnotique attirant dans sa toile tout qui se plaît à humer.
Comment ne pas se laisser enivrer par la suavité de "Julien", "Railroad" ou encore de "Side by Side", ballades à l’accent profondément jazzy, servies à merveille par un piano et des percussions (souvent aux balais) littéralement habités ? Comment ne pas se laisser emporter par le galop feutré de "Show Your Colours", ou par la fraîcheur débridée de "Russian Bells" et de "Dis-In-Motion" ? Que dire de la mélancolie bien pesée de "Seeds" ? Un peu de folk déglingué ("Something’s Scorching") ou de beat électro-organique ("A Roof Somewhere") ? Oui, il y a ça aussi dans "Fall of Spring". L’album a beau être sobre et se mouvoir dans une sérénité exemplaire, il est néanmoins baigné d’une foule d’instruments et d’arrangements qu’on a du mal à décortiquer tellement l’ensemble se mue harmonieusement en une entité insécable.
Le travail de nos trois baladins est à ce point convaincant et complet qu’il est vain de citer les quelques invités de marque qui sont venus leur "prêter main forte". Si ça vous titille, vous n’aurez qu’à vous plonger dans la pochette. En tout cas, pour ma part, je ne retiendrai qu’une seule chose : Lonely Drifter Karen. Bon, d’accord, et un peu Emily Jane White, aussi. Pas un mot de plus !
David Vertessen
A lire également, sur Lonely Drifter Karen :
la chronique de « Grass Is Singing » (2008)
Dis-In-Motion
Show Your Colours
Russian Bells
Railroad
Ready to Fall
Something’s Scorching
A Roof Somewhere
Julien
Eventually
Side by Side
Wonderous Ways
Seeds