MARC MORVAN & BEN JARRY – Udolpho
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Quatre ans que l’on espérait ce disque. En 2005, les 3 Guys Never In, le temps d’un album et d’un EP, nous avaient enflammé le coeur en rassemblant les pièces intimes et dorées de notre puzzle de mélomane. On n’avait cessé depuis de guetter l’horizon dans l’espoir d’une séquelle, d’un écho ne fut-ce qu’infime, mais la voix divine de Marc Morvan, avec le temps, avait fini par disparaître, comme si le dernier titre de l’unique album des 3 Guys Never In, "I Could Touch the Voice As I’m Close To Silence", avait malheureusement eu valeur de prophétie. Celui que l’on imaginait déjà destiné à une carrière de Morrissey ou de Neil Hannon à la française n’aurait-il finalement été l’homme que d’un seul et miraculeux album ?
Porté uniquement par sa guitare et le violoncelle de Ben Jarry, Marc Morvan refait aujourd’hui surface sur la pointe des pieds, débarrassé des tics juvéniles que d’aucuns pouvaient reprocher à son premier opus. "Udolpho" est un disque d’ermite, rempli de la mélancolie d’un homme qui reviendrait – de la guerre, d’un tour du monde en solitaire, d’une traversée du désert. Aucune rage, ici, aucun désarroi, mais de la douceur, de la tendresse pleines de nuance et de tension. Exit l’étiquette "baroque" à la Scott Walker des débuts, Morvan endosse aujourd’hui le fameux imperméable bleu des "Perdants magnifiques" chers à Leonard Cohen, tant ces nouvelles chansons rivalisent avec l’intemporalité du maître. "Down her Nest", "Before You Say Goodbye", "On Your Back" (on a envie de les citer tous !) – des titres à la beauté aussi minimale qu’époustouflante, d’une finesse mélodique addictive et entêtante. Guidés par une ligne claire et franche, les deux compères cheminent dans un paysage aride et désolé, à l’image des deux héros du film "Gerry" de Van Sant, image qui clôt d’ailleurs parfaitement l’album.
Si Marc Morvan a osé disparaître un temps, prenant ainsi le risque de nous laisser aller voir ailleurs, ce retour fait pourtant instantanément oublier toutes les pâles amourettes de passage. Des flirts qui, au bout du compte, furent à leur manière bénéfiques, tant ils confirment aujourd’hui haut et fort que notre coeur ne s’était décidément pas emballé pour rien, il y a quatre ans.
Christophe Patris
Down Her Nest
A Man at the Frontier
Before You Say Goodbye
Emily
The Murder of Our Neighbour
From the Lair of the Desert’s King
Some Magnificent Days
The Magical Gloves of K.S.
On Your Back
The Photograph of Gerry