M. WARD – Hold Time
(4AD / Naïve) [site] – acheter ce disque
Après une expérience très remarquée l’année dernière avec "She and Him", M. Ward nous revient avec "Hold Time". Le ton est donné dès la première chanson avec le petit coté désuet, suranné de "For Beginners". M. Ward chante à tue-tête "When you’re absolute beginners, it’s a panoramic view". Pour un néophyte comme moi qui découvre pour la première fois cet artiste, l’accueil est des plus chaleureux avec cette chanson de circonstance. Cette mélodie bien léchée qui colle aux tympans, cette voix enraillée et nasillarde parfaite pour accompagner ce folk léger et entêtant nous rappelant avec nostalgie les excellents The Go-Betweens, plante le décor. Au volant d’un pick-up nous voilà embarqués sur la route 66, dans les grands espaces maintes fois décrits par Jim Harisson ou Rick Bass. Nous traversons des villages-rue poussiéreux, longeons les frontières ne sachant trop où aller à l’image de Dean Moriarty, l’anti-héros Kerouacquien. Car ici, les routes sont sinueuses, les itinéraires multiples et l’inspiration de M. Ward traverse l’histoire de la musique américaine. Tous les fantômes sont là de Hank Williams à Johnny Cash en passant par John Lee Hooker. "Never Had Nobody Like You" en est la preuve. Ici c’est toute l’Amérique qui chante en 2 minutes 26. Après ces deux premiers titres sublimes, le doute s’installe. Un album entier de ce même tonneau semblait être une gageure mais tous les titres forment un patchwork de mille couleurs. Outre son excellent jeu de guitare, M. Ward a le don de créer des atmosphères très différentes d’un titre à l’autre. Le titre "Hold Time" bulle crépusculaire, petit hymne diligent est un bel exemple de dépouillement et de simplicité. Véritable tout-terrain M. Ward arpente les cimes pentues du folk-rock, de l’americana, avec un brin de voix un peu limité mais plus d’une corde à son arc. L’écriture est belle, tellurique allant à l’essentiel. A l’image d’un môme où d’un homme heureux, M. Ward s’émeut à voir les rivières couler, les pêcheurs à la ligne remonter d’énormes prises, gravit des montagnes, fait une halte, regarde au sommet et se remémore l’école primaire, le catéchisme, philosophe un peu sur "Blake’s View" puis se sentant un peu seul sur "Oh Lonesome me" redescend doucement tout comme nous, enchantés par ce disque juste, sincère et humble.
Benoît Crévits
For Beginners
Never Had Nobody Like You
Jailbird
Hold Time
Rave On
To Save Me
One Hundred Million Years
Stars of Leo
Fisher of Men
Oh Lonesome Me
Epistemology
Blake’s View
Shangri-La