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The Stills – Interview

Avec leur troisième album, « Ocean Will Rise », sorti sur le label de Toronto Arts&Crafts (maison mère de Broken Social Scene), les Montréalais de The Stills, actifs depuis 2000, rendent enfin le rock de stade fréquentable. Chant à gorge déployée, batterie puissante, guitares exaltées, son panoramique : leurs chansons ont des allures d’hymnes, mais sont suffisamment variées et bien écrites pour qu’on puisse les apprécier dans l’intimité de son salon ou d’une petite salle de concert – en France, le groupe est encore très loin de remplir le Parc des Princes. Entretien en français de la Belle Province avec le bassiste Olivier Corbeil, alias Oliver Crowe, rejoint sur la fin par le batteur Julian Blais (retranscrit à l’aide du « Dictionnaire des expressions québécoises » de Pierre DesRuisseaux, éd. Bibliothèque québécoise, 1990), quelques heures avant leur concert parisien au Divan du Monde.

The Stills

Bonjour Olivier, peux-tu présenter les autres membres du groupe ?
Olivier Corbeil : Il y a Tim Fletcher et David Hamelin, tous deux chanteurs et guitaristes, Julien Blais, notre batteur qui est là depuis quasiment trois ans, et le claviériste Liam O’Neil. Il y a eu quelques changements de personnel au fil des années. Notre guitariste Greg Paquet a quitté le groupe en 2003, après la sortie de notre premier album. Julien a remplacé le batteur précédent après que nous l’avons rencontré au festival de Reading, où il avait joué avec son groupe d’alors. Il avait entendu dire qu’il y avait des Québécois et il était tout excité ! Il a vu jouer les Stills, puis on a pris une bière ensemble et finalement on s’est soûlé la gueule… On s’est bien entendus et il nous a dit de l’appeler si un jour on cherchait un batteur. Un peu plus tard, on a fait une audition avec une douzaine de batteurs. Julien devait être le septième. Il a joué quelque chose comme une minute et on lui a dit : « C’est bon, t’es dans le groupe. »

Il y a à la fois des Canadiens francophones et anglophones dans le groupe ?
Nous sommes tous de Montréal à part Julien qui est d’une petite ville un peu plus au nord, et nous sommes tous bilingues. Julien et moi sommes francophones à l’origine, David est à la fois anglophone et francophone, et Liam et Tim sont des « Anglais ».

Vos trois albums sont assez différents.
Absolument. Le premier, comme pour n’importe quel groupe, c’est une collection de chansons qui existaient depuis longtemps. On montrait ce qu’on savait faire. Sur le second, on a voulu expérimenter avec des styles qui nous étaient moins familiers. Avec le troisième, on a arrêté de se casser la tête et on a enregistré ce qui nous venait à l’esprit. Sur les deux premiers, on était assez influencés par les critiques, les avis extérieurs, on était jeunes et pas trop sûrs de nous. Arrivés au troisième, on se dit que si les gens aiment, tant mieux, sinon, « on s’en crisse ». A un moment, il faut que tu te laisses aller, que tu te fasses confiance en tant qu’artiste.

Comment s’est faite la signature avec Arts&Crafts ?
Très naturellement. On est amis depuis longtemps avec Broken Social Scene. La première fois qu’ils sont allés au South By Southwest à Austin, on y était aussi et on a joué ensemble dans le cadre du festival canadien qu’ils programment chaque année. On connaît bien aussi les Constantines, ou Feist : chaque fois qu’elle vient à Montréal, on fait un barbecue ensemble, c’est super cool. J’ai même connu ma copine grâce à Jeffrey Remedios, qui dirige Arts&Crafts… C’est vraiment comme une grande famille. Nous étions signés chez Vice records, mais ils ont perdu leur deal avec Atlantic et devaient se restructurer. Comme on ne voulait pas attendre, on s’est tourné vers Arts&Crafts, qui nous ont tout de suite proposé un contrat et un budget pour enregistrer l’album. Signer avec eux relevait de l’évidence.

Pour toi, la scène canadienne est une réalité ?
Oui, et je pense qu’elle n’a jamais été aussi forte qu’aujourd’hui. Pour un pays avec une population de 33 millions de personnes, il y a une représentation assez impressionnante, dans tous les styles. C’est un peu comme l’Islande avec tous ces groupes apparus dans le sillage de Björk, alors que le pays ne compte que 300 000 habitants. La scène canadienne est majoritairement concentrée à Montréal et Toronto. On se connaît assez bien, il y a des liens d’amitié forts, on tourne beaucoup ensemble. Il y a peu de compétition, les gens s’encouragent beaucoup. C’est vraiment très cool, ce qui se passe.

Le choix de chanter en anglais, c’était évident pour vous ?
Oui, car Tim est anglophone et David n’a jamais écrit en français. On joue quand même une « toune » en français, « Retour à Vega », écrite par un autre groupe de Montréal, Chinatown (le morceau se trouve sur la BO du film « Wicker Park », ndlr). Mais passer d’une langue à l’autre, c’est comme demander à un peintre de changer de pinceaux, c’est très difficile. C’est pour ça que quand on a voulu avoir une chanson en français, on a demandé à un autre groupe si on pouvait reprendre une des leurs. Je pense qu’on finira quand même par en sortir une. On en avait écrit une pour le deuxième album, « Série noire », mais en fin de compte on ne la trouvait pas assez bonne et on l’a laissée de côté. On espère pouvoir en mettre une sur un EP qu’on doit enregistrer prochainement, ou alors sur le quatrième album. Après tout, la moitié du groupe est quand même francophone, et c’est quelque chose qui me tient à cœur. La francophonie reste forte au Québec, on est quand même la deuxième population de langue française dans le monde.

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