Loading...
Disques

Loney, Dear – Dear John

LONEY DEAR – Dear John
(EMI) [site] – acheter ce disque

LONEY, DEAR - Dear JohnVoici un artiste bien difficile à appréhender : une voix que je qualifierais de quelconque, un son qui n’a rien de révolutionnaire, et pourtant, le Suédois a toujours su trouver la formule qui touche, le zeste de différence qui fait mouche. Oui, on pourrait parler d’un "toucher" à la Loney dear : une musique anodine, des mélodies honorables mais pas transcendantes, dont l’intérêt réside dans le fait qu’elles finissent immanquablement par être frappées d’une originalité enveloppante – à nouveau difficile à définir – qui donne aux morceaux une étonnante texture organique. Peut-être est-ce aux moments des arrangements qu’Emil sort son épingle du jeu. Muni de son fidèle multipiste, le roi du tricot fait preuve d’une aisance toute particulière pour tisser ses chansons à la façon d’un patchwork. Ce n’est qu’une fois raccommodés les uns aux autres que les petits bouts d’étoffes vocales (la manière dont il superpose ses choeurs sur sa voix de falsetto – sauf sur la très inspirée "Everything Turns to You" où il utilise également un timbre grave – est sans conteste l’un de ses atouts majeurs) et instrumentales trouvent tout leur sens. Et comme Emil se livre, l’air de rien, au même modus operandi depuis qu’il nous est donné de le connaître, on ne peut vraisemblablement pas parler d’un coup de chance isolé, mais bien d’un talent confirmé. Quand on pénètre ses orchestrations, on constate qu’il a saupoudré ça et là des étrangetés qu’il s’amuse à nous faire récolter, une chasse aux oeufs d’or qui écarte insidieusement l’auditeur des sentiers balisés qu’il pensait naïvement emprunter au départ du jeu de piste, dont on ne sort pas pour autant.

Ce qu’il est joueur cet Emil, avec ses poches bondées de surprises en tout genre. "Dear John", la cinquième pièce du puzzle, comme il dit, confirme son penchant pour la fausse banalité. Une fois de plus, il apparaît là où on ne l’attend pas : au beau milieu d’une fanfare (que l’on retrouve sur le finale salutaire de "Dear John") ; en train de léviter quelque part entre des arpèges de guitares et ses propres choeurs multidirectionnels ; errant dans une mélancolie léchée de cordes frottées, en l’occurrence celles d’Andrew Bird, venu lui prêter main forte sur "I Got Lost". Mais ce qui frappe avant tout sur ce nouvel opus, c’est cette couleur sépia presque orangée qui transparaît un peu partout, laquelle trouve son origine ici : un synthétiseur au son profondément eighties qui apporte une patine plutôt agréable dans l’ensemble – et particulièrement sur "Harsh Words", "Summers" et "Distant Lights" (on croirait presque entendre l’écho de Thom Yorke en toile de fond) , ainsi qu’un rythme plus soutenu que sur les précédents essais, ce qui n’est pas pour déplaire non plus. Néanmoins, de cette mouvance électro ne jaillit pas que de bonnes choses : "Under a Silent Sea", par exemple, n’est certes guère mise en valeur par l’effet métallique de la voix, l’espèce de techno, osons le dire, ringarde, et les violons de synthèse qui viennent "habiller" son épilogue – allez, les dernières secondes sont tout de même sympas. Mais un album du sieur Svanängen se veut d’être apprécié dans son ensemble, et avec un départ en trombe sur une rampe de lancement comme "Airport Surroundings", et toutes les jolies choses qui suivent dans son sillage, ce n’est pas un ou deux trous d’air qui pourraient faire tanguer la belle entreprise "Dear John".

David Vertessen

A lire également, sur Loney, Dear :
la chronique de « Loney, Noir » (2007)
la chronique de « Sologne » (2007)
l’interview (2007)

Airport Surroundings
Everything Turns to You
I Was Only Going Out
Harsh Words
Under a Silent Sea
I Got Lost
Summers
Distant Lights
Harm/Slow
Violent
Dear John

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *